L'INFO. Il est surnommé "le terroriste juif" par les médias israéliens. Un tribunal de Jérusalem a condamné mardi un colon israélien d'origine américaine, Jack Teitel, à la prison à vie pour le meurtre de deux Palestiniens. Il a été reconnu coupable du meurtre d'un chauffeur de bus et d'un berger palestiniens en 1997, de deux tentatives de meurtre, mais aussi de fabrication et détention illégale d'armes ainsi que d'incitation à la violence.
L'inculpé écope de deux peines de prison à vie, une pour chaque victime, et devra également verser 180.000 shekels (environ 36.000 euros) à chacune des familles. Le juge Yoed Cohen a rappelé, dans son verdict, "qu'au lendemain du Jour de la Shoah qui marque le souvenir des millions de juifs tués par une idéologie raciste démente (...), un homme, et à plus forte raison un juif, se doit de ne jamais oublier l'injonction 'Tu ne tueras point'".
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Une série d'attentats à son actif. Jack Teitel est un activiste religieux d'extrême-droite. Agé de 40 ans et père de quatre enfants, il habitait avant son arrestation, Shvut Rachel, une colonie de Cisjordanie, occupée depuis 1999. En octobre, l'homme est arrêté par la police alors qu'il colle des affiches de soutien à l'attaque qui a tué deux personnes dans un centre d'aide à la communauté gay en 2009 à Tel-Aviv. Il appelait ouvertement au meurtre de ces "sodomites".
Lors de son interrogatoire, il finira par avouer être l'auteur des deux meurtres et de six attentats à la bombe depuis douze ans. Il a notamment revendiqué une attaque contre le domicile de l'historien Zeev Sternhell, connu pour ses opinions de gauche et l'envoi d'un colis piégé à une famille de juifs messianiques, des religieux qui reconnaissent Jésus comme le messie. Un adolescent avait été grièvement blessé par l'explosion de cet engin. Jack Teitel est un coutumier de ce type d'attaques. Il est également l'auteur d'un attentat à la bombe contre un monastère, croyant que les prêtres… séduisaient des enfants juifs avec des bonbons. Il a également pris pour cibles à plusieurs reprises la police et des commissariats qu'il accuse de protéger la communauté gay.
Le Shin Beth tente de le recruter. A l'époque, cette affaire avait mis en lumière les failles de la sécurité israélienne. La "loi du retour" permet à tout Juif de demander la citoyenneté israélienne sous réserve de validation du ministère de l'Intérieur. Ce fut le cas pour Jack Teitel qui avait quitté les Etats-Unis pour se réinstaller en Israël. Le Shin Beth, le service de Sécurité intérieur, qui le soupçonnait d'activités illicites l'avait interrogé en 2000 mais avait dû le relâcher faute de preuves. A l'époque, le quotidien Yediot Aharonot avait révélé que le Shin Bet l'avait même contacté pour devenir un espion, ce que l'institution avait par la suite confirmé. Ce service de renseignements israélien souhaitait l'utiliser comme informateur sur les milieux d'extrême droite, ce qu'il a toujours refusé. Le Shin Beth "n'a eu qu'un nombre limité d'entretiens avec lui, sans résultat. Après quoi les contacts ont été rompus", précisait l'institution.
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Proche d'un mouvement nationaliste. L'un des amis de Jack Teitel serait Avraham Richland. Cet homme connu en Israël pour avoir aidé Eden Natan-Zada, un militant qui aurait tué quatre arabes israéliens dans une fusillade en août 2005. Jack Teitel serait proche des "kahanistes", un mouvement nationaliste lancé par le rabbin Meir David Kahane qui prône l'établissement d'une théocratie en Israël. Avant même les Palestiniens, leur premier ennemi est donc l'Etat d'Israël.
Cet homme endoctriné était-il réellement maître de ses actes au moment des faits ? Selon la justice israélienne, Jack Teitel était en pleine possession de ses capacités mentales. Lors de son procès, ses avocats affirmaient qu'il n'était pas responsable en raison de son état "instable".