Cette activiste tunisienne des Femen était séquestrée par sa famille. Elle raconte.
L'INFO. Depuis plusieurs semaines, le sort de la jeune tunisienne Femen, Amina restait incertain. Des rumeurs faisaient état d'une disparition, ainsi que d'éventuelles représailles de groupes salafistes. En réalité celle qui avait publié sur Internet des photos seins nus à la manière du groupe féministe était bien recluse chez ses parents contre son gré comme l'avaient découvert plusieurs médias.
"Ma fille a quitté vendredi à notre insu la maison et nous ne savons pas depuis où elle se trouve", a assuré lundi la mère d'Amina, qui refuse d'être identifiée. "J'ai peur pour ma fille qui suit un traitement psychiatrique depuis six ans", a-t-elle ajouté, précisant qu'elle venait de demander conseil au médecin d'Amina à Tunis et qu'elle comptait aussi se rendre dans l'après-midi au ministère de l'Intérieur pour déclarer la fugue de sa fille.
Elle se trouverait dans un lieu sûr. Une information confirmée lundi à ParisMatch.com par Inna Shevchenko, cofondatrice du mouvement féministe. "Elle s’est enfuie par elle-même, mais nous l’avons aidée à trouver un endroit dans lequel elle serait en sécurité. Nous avons tenté de la persuader de quitter la Tunisie, mais elle nous a répondu qu’elle ne partirait qu’après y avoir manifesté seins nus !", a-t-elle affirmé.
"Des médicaments à haute dose". Un peu plus tard lundi, une vidéo de sa conversation avec Amina a été postée dans laquelle elle raconte sa captivité. "J'étais au café avec des amis lorsque mon cousin est entré. Il m'a attrapée et violemment poussée par terre. Ils m'ont poussée dans une voiture, pris mon téléphone portable et emmenée chez ma tante", raconte Amina dans cette conversation Skype. Elle aurait reçu des coups et aurait été obligée de suivre un examen de virginité chez sa grand-mère. "Ils m'ont obligée à lire le Coran. Ils m'emmenaient chez l'imam tous les jours", témoigne-t-elle. Puis elle a été emmenée dans un village où elle a reçu des "médicaments à haute dose".
"Je dois quitter la Tunisie". La semaine dernière, Amina avait été filmée par une équipe de Canal+ aux côtés de son père. La jeune fille semblait très diminuée, sûrement sous l'emprise de médicaments. Sa famille l'aurait forcé à lire le Coran et à rencontrer des imams pour la remettre dans "le droit chemin". Amina racontait aussi qu'à cause des photos postées sur Internet, elle ne pouvait plus retourner à l'école.
"Peut-être dans une école privée mais ce n'est pas sûr. Ils peuvent ne pas m'accepter", affirmait-elle face caméra. "Je dois quitter la Tunisie car j'ai reçu beaucoup de menaces de mort sur le téléphone et sur Facebook. J'ai peur pour ma vie et la vie de ma famille. On m'a dit : 'tu vas mourir et on va jeter de l'acide sur ton visage'", affirmait Amina à Canal + qui déplorait avoir été contrainte de rester chez sa famille.
Quelques jours auparavant, une journaliste de Marianne l'avait également rencontrée et, selon elle, elle "n’est pas libre de ses mouvements et de ses contacts, bien que majeure". La famille justifie cet "enfermement" à cause de sa "fragilité psychologique". "Des parties instrumentalisent l'histoire de ma fille au détriment de son intérêt (...). Il n'y a jamais eu d'histoire de kidnapping, nous essayons simplement de protéger notre fille en refusant de la laisser sortir toute seule par mesure de sécurité", s'est défendue la mère d'Amina, la voix étranglée.