La Libye sert de base arrière aux terroristes. C'est devenu le "trou noir" de l'Afrique du Nord. En proie à un chaos politique sans précédent, tiraillée entre différentes milices, sillonnée par des groupes terroristes, le Libye est devenue la principale matrice du danger djihadiste dans la région. Les attentats du musée du Bardo n'ont fait que confirmer cette triste réalité. Et pour cause, le secrétaire d'Etat tunisien chargé de la sécurité intérieure l'a confirmé vendredi, les deux auteurs de l'attaque sanglante -21 morts- se sont entraînés dans des camps situés de l'autre côté de la frontière.
Ils rejoignent la Libye dès le mois de décembre dernier. Ces "deux éléments extrémistes salafistes takfiris" (le takfirisme prône l'excommunication et l'agression de tous les croyants qui ne respectent pas les préceptes de l'Islam tels qu'ils sont entendus par le courant) ont quitté le pays en décembre dernier pour rejoindre la Libye", a dévoilé le secrétaire d'Etat.
Plusieurs camps spécialement dédiés aux Tunisiens. A ce stade de l'enquête, difficile d'avoir plus de détails sur la trajectoire des deux hommes tués dans l'assaut de la police mercredi, mais il y a fort à parier qu'ils ont rejoint l'un des camps d'entraînements pour Tunisiens qui se sont montés en Libye. "Ils ont pu se former à Sabratha, à Benghazi et à Derna (ville où l'Etat islamique a instauré la chariah)", a précisé le secrétaire d'Etat. Nombreux sont les ressortissants tunisiens à passer la frontière pour rejoindre les camps et embrasser la cause du djihad. On estime qu'ils sont environ 3.000 à participer à la "guerre sainte" islamiste, chiffre impressionnant rapporté à la population totale du pays (11 millions d'habitants).
Des agents dormants et des combattants de retour au pays. A l'instar des deux assaillants du musée du Bardo, ils seraient au moins 500 Tunisiens, de retour d'Irak, de Syrie ou de Libye, à être retournés sur leur sol natal. Des "éléments suspects" membre de "cellules dormantes" qui font craindre aux forces de police de potentielles nouvelles attaques. En reprenant l'exemple d'un des deux responsables du bain de sang de Tunis, le secrétaire d'Etat à la sécurité tente d'expliquer toute la difficulté d'empêcher ces attentats : "Nous savions qu'ils pouvaient mener des opérations, mais il faut pouvoir rassembler des indices pour mener une arrestation".
Menaces extérieure… et intérieure. Si l'organisation de l'Etat islamique, ou du moins des personnes s'en réclamant, ont revendiqué l'attentat, la Tunisie lutte également depuis 2011 contre une faction d'AQMI (Al Qaïda au Maghreb Islamique), la Phalange Okba Ibn Nafaâ, responsables de la mort de dizaines de policiers et soldats à la frontière algérienne. Prise entre deux feux algérien et libyen et susceptible d'accueillir en son sein des djihadistes de retour au pays, la Tunisie reste sur des charbons ardents. Et devra rester prudente pour pouvoir panser ses plaies.
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