L’Union Européenne entend réformer le secteur de la pêche afin de préserver les ressources de poissons. Bruxelles a déposé mardi un projet de réforme dont l’adoption s’annonce très compliquée : hormis plusieurs pays nordiques, les Européens sont contre, à commencer par l’Espagne et la France.
Objectif principal : protéger les stocks de poisson
Venue présenter ses idées devant les ministres européens de la Pêche réunis à Bruxelles, la commissaire Maria Damanaki a privilégié plusieurs pistes de travail : instaurer un marché des quotas de capture attribués aux pêcheurs, ne prélever que le strict nécessaire pour ne pas mettre en danger la reconstitution des stocks et lutter contre le gaspillage en évitant les rejets.
Par le système de quotas, l’UE espère rationaliser les flottes de pêche surdimensionnées, sans avoir à verser de primes à la casse. Elle espère aussi lutter contre le gaspillage que constituent les rejets, ces poissons non commercialisables aujourd'hui rejetés par-dessus bord.
Vives protestations du Sud, dont la France
Censées entrer progressivement en vigueur à partir de 2013, ces mesures ont reçu un accueil favorable du Royaume-Uni, du Danemark, de la Suède ou encore de l'Estonie. Ces pays ont même précisé que la réforme aurait pu aller "plus loin".
Mais la majorité des pays membres ont vivement réagi à ces propositions, le ministre français de l’Agriculture Bruno Le Maire allant jusqu’à dénoncer "des décisions trop radicales (qui) entraîneront la fermeture de la pêche en Europe". Quand au projet d’interdire les rejets de poisson dès 2016, il a été jugé "pas réaliste".
"Annonce officielle de la fin de la pêche en France"
Du côté des professionnels de la pêche, la réaction est encore plus vive. "En l’espace de dix ans, la flotte française a diminué de 50%. Si nous diminuons encore l’effort de pêche, avec des navires qui ont près de 25 ans, nous allons mettre en péril toute une filière tout le long du littoral français", a prévenu sur Europe 1 Olivier Le Nézette, président du comité local des pêches Lorient-Etel.
"En clair, c’est la mort de la pêche française", a-t-il résumé, avant de menacer : "les professionnels sont très inquiets parce que cette règlementation sera l’annonce officielle de la fin de la pêche en France". Stéphane, qui possède un fileyeur à Boulogne-sur-Mer, se dit "écœuré par toutes ces contraintes qui s'ajoutent chaque année". "Ce système de quota transmissible va certainement permettre à de grosses société de pouvoir s'accaparer des quotas en les racehtant à des entreprises qui se trouvent en difficulté", ajoute-t-il.
Pour éviter une levée de boucliers généralisée, l’UE s'est néanmoins dite ouverte au dialogue et propose déjà d’épargner les petits pêcheurs : les navires de moins de douze mètres non équipés d'engins traînants, comme des dragues ou des chaluts, seraient exemptés des nouvelles règles.