L'INFO. Une édition commentée et critique de Mein Kampf, l'oeuvre idéologique d'Adolf Hitler, verra bien le jour en Allemagne. La Bavière a renoncé mercredi à engager des poursuites contre un projet d'universitaires lorsqu'elle perdra les droits sur l'ouvrage fin 2015. D'abord soutien de ce projet, la Bavière avait laissé entendre en décembre qu'elle l'attaquerait en justice, sur fond de pressions israéliennes présumées, mais a finalement fait une nouvelle volte-face.
>>> Retour sur cette volte-face en trois étapes :
• La Bavière s'opposait à toute réédition. Il y a deux ans, le ministère des Finances de Bavière, qui détient les droits sur Mein Kampf (Mon combat) jusqu'à la fin 2015, avait annoncé qu'une édition annotée de l'ouvrage, conçue par des universitaires, serait publiée juste avant que les droits ne tombent dans le domaine public. Cet ouvrage, qui esquisse l'idéologie violemment antisémite du régime nazi, n'est pas interdit en Allemagne, mais la Bavière, à qui les Alliés ont confié les droits sur l'ouvrage à la fin de la Guerre, s'oppose juridiquement à toute réédition depuis 1945.
Les autorités régionales avaient accordé une enveloppe de 500.000 euros à un institut de recherches en histoire de Munich (sud) chargé de rédiger une édition critique du livre écrit par Hitler en 1924.
• Israël manifeste son émoi. Mais en décembre, le gouvernement bavarois avait changé d'avis et annoncé son intention de s'opposer à toute publication, quelle qu'elle soit, de Mein Kampf après 2015, en invoquant l'incitation à la haine raciale. Ce coup de théâtre était intervenu après un déplacement en Israël du dirigeant de la région, Horst Seehofer, en décembre 2012. Au cours de ce séjour, des organisations juives et même le président israélien, Shimon Peres, auraient manifesté leur émoi face au projet. La Bavière s'était alors retrouvée dans une situation embarrassante puisqu'elle semblait prête à faire interdire une édition critique qu'elle avait elle-même financée.
Le conseil central des Juifs d'Allemagne, principale organisation représentative de cette communauté dans le pays, s'était d'ailleurs déclarée favorable au projet d'édition commentée.
• La liberté scientifique. Mercredi, le ministre régional de l'Éducation et des Sciences, Ludwig Spaenle, a invoqué la liberté scientifique pour tenter de justifier ce nouveau revirement. "On ne peut pas porter atteinte à la liberté scientifique de l'Institut" de Munich chargé de l'édition critique, a-t-il assuré dans un communiqué. "Il peut publier une édition (de "Mein Kampf"), cela relève de sa propre responsabilité", a-t-il ajouté.
Même s'il n'est pas pour l'instant édité en Allemagne, l'ouvrage reste très facile à trouver, notamment sur Internet, où des éditions en allemand ou en langue étrangère sont proposées à la vente.
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