L'homme prête une attention particulière au vocabulaire. D'autant plus lorsque sa conscience religieuse le travaille. Au deuxième jour du procès de l'ex-majordome du pape, poursuivi pour "vol aggravé" dans l'affaire "Vatileaks", Paolo Gabriele, 43 ans, s'est déclaré "innocent" du délit qui lui est reproché, mais "coupable" vis-à-vis de Benoît XVI.
Dans un discours face aux juges de quasi repentance, il a déploré avoir "trahi la confiance qu'avait placée en moi le Saint-Père que j'aime comme si j'étais son fils". A la barre des accusés, il a livré de quelques détails sur sa relation avec le Pape. "Ce qui m'a vraiment scandalisé est que lorsque je me retrouvais à la table du Saint-Père pour déjeuner il lui arrivait de me poser des questions sur des choses dont il aurait du être informé", a assuré l'ex-employé modèle, surnommé "Paoletto" au Vatican.
"C'est là que j'ai acquis la conviction qu'il était facile de manipuler une personne qui a entre ses mains un pouvoir aussi énorme", a-t-il ajouté. "Pensiez-vous que le pape était mal informé ?", lui a demandé son avocate. "Oui, certainement", a répondu le majordome qui a affirmé vouloir combattre "le mal et la corruption" au Vatican.
Pas "le seul" à fournir la presse
Cet ancien proche du Pape est accusé de s'être emparé de centaines de documents confidentiels du Saint-Père pour les transmettre au journaliste Gianluigi Nuzzi. Ce dernier les a ensuite publiés dans un livre, Sua santità (Sa Sainteté), qui révèle intrigues et violentes animosités, en particulier à l'encontre du numéro deux du Vatican, le cardinal Tarcisio Bertone. La somme des documents saisis dans les appartements du majordome remplit pas moins de 82 cartons.
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Face aux juges, il a raconté comment, depuis sa prise de fonction au Vatican en 1997, il s'est fait connaître au point que "tous me faisaient confiance", notamment les cardinaux, ces hauts-dignitaires chargés d'assister le Pape. Mais au Saint-Siège, il sentait déjà un "mécontentement vaste et diffus". En revanche, il a réfuté d'être l'unique "corbeau" dans cette affaire. "Je ne suis pas le seul au cours des années à avoir fourni des informations confidentielles à la presse", a-t-il martelé.
Au cours de l'audience, consacrée à son audition, ainsi qu'à celle de plusieurs témoins, dont le secrétaire particulier du pape, Paolo Gabriele a précisé qu'il n'avait pas reçu d'argent en échange des documents. "C'était une condition essentielle", a-t-il insisté.
La lumière est allumée 24 heures sur 24
Au passage, l'ex-majordome s'est plaint de ses conditions de détention, après son arrestation le 23 mai, et notamment de "pressions psychologiques" pendant sa détention. Il a affirmé avoir été emprisonné pendant quinze jours dans une cellule où il ne pouvait même pas étendre les bras et où la lumière était allumée 24 heures sur 24. Le Vatican a décidé l'ouverture d'une enquête. Mais aussitôt après l'audience, son porte-parole, le père Lombardi, a précisé que le Saint-Siège respectait les conventions internationales auxquelles il adhère en matière de conditions de détention.
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"La cellule répond aux normes de détention prévues également dans d'autres pays", a assuré également la gendarmerie vaticane dans un communiqué. Néanmoins, celle-ci a reconnu que la pièce présentait des problèmes car Paolo Gabriele "a été transféré dans une nouvelle cellule une vingtaine de jours après son arrestation, une fois finis les travaux de restructuration". Elle a également précisé que la lumière était allumée pour des raisons de "sécurité" et qu'un bandeau lui avait été fourni puisqu'il puisse dormir quand il le souhaite.