Spécialiste des scoops de grande envergure et responsable d'un séisme diplomatique avec la publication de milliers de documents confidentiels à l’automne dernier, WikiLeaks est-il à son tour victime d'une taupe ? La question se pose alors qu'un journal norvégien a fait main basse sur les mêmes 250.000 notes en possession du site de Julian Assange.
Depuis un mois, Aftenposten, le quotidien de référence norvégien, lève le voile sur les secrets de la diplomatie américaine sans avoir à suivre le script bien ordonné de Julian Assange. Une trentaine de journalistes épluchent l'immense base de données obtenue par un tour de passe-passe tenu secret.
Aftenposten bouscule WikiLeaks
Aftenposten a ainsi enfoncé un coin dans la stratégie de WikiLeaks qui a conclu un accord avec cinq grands titres internationaux (The Guardian, The New York Times, Le Monde, Der Spiegel, El Pais) en vue de diffuser ces documents par blocs, selon des conditions non dévoilées.
Au fil des jours, le journal de référence norvégien, qui tire à 240.000 exemplaires, fait ses choux gras des télégrammes diplomatiques américains, potentiellement lourds de conséquences. Il a ainsi rapporté qu'Israël avait voulu asphyxier Gaza économiquement, que l'Allemagne travaillait sur des satellites-espions au grand dam de Paris, et que la Syrie avait facilité les attaques contre les ambassades scandinaves lors des manifestations contre les caricatures de Mahomet en 2006.
Des révélations lourdes de conséquence
A l'appui de ses articles, le journal publie systématiquement sur son site www.aftenposten.no les documents qu'il cite. Ces révélations ont coûté son poste au dirigeant du fabricant allemand de satellites OHB System, Berry Smutny, suspendu pour avoir taxé le GPS européen Galileo d'"idée stupide", selon une note publiée par Aftenposten.
En résidence surveillée en Grande-Bretagne avant une éventuelle extradition vers la Suède où il fait l'objet d'une enquête pour viol et agressions sexuelles, Julian Assange, également dans le collimateur des autorités américaines, tente, lui, de faire bonne figure. Aftenposten est "un média partenaire" de WikiLeaks, a déclaré l’Australien.
Du travail pour deux ans
Une affirmation catégoriquement contestée par le prétendu partenaire. "Selon nos informations, Julian Assange est - c'est un euphémisme - très peu content qu'Aftenposten lui aussi ait obtenu les 251.287 documents diplomatiques américains auprès d'une source", écrivait sa rédactrice en chef, Hilde Haugsgjerd, le 4 janvier.
L'immense masse de documents n’a en tout cas pas fini d’alimenter les pages d’Aftenposten. Selon un rédacteur, il y a de la matière pour écrire des articles "pendant encore un an, peut-être deux".