Le 18 mars 1692, les accords d'Évian ont mis fin officiellement et politiquement à l'affrontement entre les forces françaises et le mouvement nationaliste algérien. Soixante ans après, jour pour jour, Europe 1 propose à partir de ce vendredi le podcast Ici Alger, Europe n°1, écrit par Pauline Jacot et Sébastien Guidis, disponible sur toutes les plateformes d'écoute. Ces accords historiques ont ouvert la voie à l'indépendance de l'Algérie, comme le retracent les archives de la station.
La fin de huit ans de guerre, mais pas des violences
Le soir du 18 mars 1962, le général de Gaulle s'adresse aux Français depuis le palais de l'Élysée. "La perspective qui s'ouvre sur l'avènement d'une Algérie indépendante, coopérant étroitement avec nous, satisfait la raison de la France", déclare le premier président de la Ve République. Les accords d'Évian mettent alors fin à huit ans de guerre. Ils incluent une aide économique à l'Algérie et une sauvegarde des intérêts français dans le Sahara.
Le cessez-le-feu doit avoir lieu le lendemain, 19 mars. Mais les violences continuent entre des membres de l'armée française et des Algériens sur place. "On est dans une poudrière", raconte alors le journaliste d'Europe 1. "Les balles ne sont pas passées loin. Ça tire environ à 25 mètres à ma gauche", affirme-t-il sous le bruit des balles, "comme une rafale. Et le calme revient. C'est ça, Alger."
Le "Oui" à l'indépendance massivement voté
Au moment du cessez-le-feu, l'Organisation de l'armée secrète (OAS) redouble de violence. L'OAS veut torpiller les accords d'Évian et lance une insurrection le 23 mars 1962. Trois jours plus tard, l'armée tire sur des manifestants pacifistes. C'est la fusillade de la rue d'Isly, qui fera au moins 49 morts selon le bilan officiel. Une tragédie franco-française passée sous silence par Charles de Gaulle. Le soir-même, le général appelle à voter "Oui" au référendum sur les accords d'Évian.
Le référendum sur l'indépendance de l'Algérie a lieu le 8 avril, et le camp du "Oui" l'emporte largement avec plus de 90% des voix. L'OAS poursuit son déchainement de violences, comme le raconte le correspondant d'Europe 1 sur place, René Duval : "Ce matin, on parle surtout à Alger de cet attentat où deux petits garçons musulmans qui jouaient au ballon dans la rue, devant l'appartement de leurs parents, ont été abattus."
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"Nous abandonnons tout. On est désespérés"
Le correspondant d'Europe 1 demande des précisions à un jeune témoin de la scène. "Ils étaient quatre" à avoir tiré depuis une voiture, explique un petit garçon. "Ils ont tiré comme ça et ils sont partis. Je ne sais pas comment ils tirent sur les enfants comme ça, ils sont fous", poursuit l'enfant au micro d'Europe 1. Les Français d'Algérie quittent par centaines leur ville, leur maison. Ils partent en métropole où souvent personne ne les attend, et témoignent au micro d'Eugène Saccomano. "On part comme les réfugiés, deux valises chacun, une à chaque bras", dit un premier homme.
"C'est honteux, on est comme des bêtes", affirme une autre femme. Le journaliste d'Europe 1 la questionne : "On nous dit que les gens abandonnent leur voiture pour aller à l'aéroport, c'est vrai ?" "Ils mettent le feu, parce qu'on leur prend leurs autos", répond-elle, avant d'évoquer le climat "désolant" pour les Européens à Alger : "Nous abandonnons tout. On est désespérés."
En juillet 1962, c'est la fin de la guerre, mais d'autres batailles ne tarderont pas à s'ouvrir, comme celle des harkis, exclus en France, bannis en Algérie. Le même mois, pour la première fois, l'Algérie hisse son drapeau, l'Algérie est indépendante.