Accusé d'être impliqué dans un complot contre le pouvoir, Hamza ben Hussein, demi-frère du roi de Jordanie, Abdallah II, a été assigné à résidence avec sa femme et leurs cinq enfants, samedi. Une quinzaine d'opposants ont par ailleurs été arrêtés afin de neutraliser une "menace à la stabilité de l’État".
Une révolution de palais secoue la Jordanie depuis samedi. Le roi Abdallah II a fait arrêter une quinzaine d’opposants à la tête desquels se trouverait son demi-frère Hamza ben Hussein, l’ancien prince héritier.
Lundi, le roi a pris l'initiative d'une médiation avec le prince Hamza pour régler la fracture au sein de la famille royale, a annoncé le palais royal. "Sa Majesté le roi Abdallah II a décidé de traiter la question du prince Hamza dans le cadre de la famille hachémite et il l'a confiée à (son oncle) le prince Hassan qui, à son tour, a communiqué avec le prince Hamza et ce dernier a dit qu'il adhérait à l'approche de la famille...", a tweeté le palais.
De son côté, dans une lettre publiée lundi soir dans un communiqué du palais royal, le prince Hamza a promis de "rester fidèle" au roi Abdallah II. Quoi qu'il en soit, une crise de ce type est très inhabituelle au sein même de la monarchie hachémite.
De nombreux opposants
Un tel déballage est effectivement une grande première pour cette dynastie qui va fêter dimanche prochain son centenaire à la tête du royaume. Jusqu'à présent, celle-ci avait toujours pris soin de régler les différends familiaux derrière les portes closes de son palais, afin d'éviter de donner le moins de prise possible à ses opposants. Des opposants dont cette illustre lignée ne manque pas, celle-ci ayant régné pendant longtemps sur l'Arabie saoudite, l'Irak puis la Syrie, des pays dont elle a été chassée tour à tour.
La Jordanie reste aujourd’hui le dernier joyau accroché à sa couronne, ce qui n’est pas une sinécure : le pays est petit, sans véritable richesse naturelle, avec une population composée en majorité de réfugiés palestiniens mais dirigés par les tribus bédouines, le tout sur fond de fort repli économique et d'une grave crise migratoire. En effet, la Jordanie partage une frontière avec Israël, l’Irak et la Syrie, trois voisins en proie à un conflit larvé ou à des guerres ouvertes.
Aussi, maintenir un semblant d’équilibre dans un tel contexte est un exercice particulièrement périlleux pour le roi Abdallah. Et alors que la règle d’or qui s’appliquait à l’ensemble de la famille régnante était de ne pas exprimer publiquement ses divergences sur les affaires de gouvernances, le prince Hamza s'en est affranchi en affichant ostensiblement son soutien au mouvement protestataire qui dénonce la corruption des cercles dirigeants jordaniens. D'où la réaction de son demi-frère, le roi.
Légitime d'un point de vue dynastique
Si les critiques de Hamza ben Hussein sur le train de vie de la cour en période de disette étaient difficilement tolérables pour le monarque, c'est qu'elles sont extrêmement populaires. Mais surtout, le prince Hamza n'est pas dépourvu d'ambitions et demeure légitime d'un point de vue dynastique.
En effet, lorsque le roi Hussein a désigné Abdallah, son fils ainé, comme successeur, il a également adoubé son cadet, Hamza, comme prince héritier. Ce dernier peut donc potentiellement se substituer à son frère si celui-ci venait à s'effacer. Une hypothèse qui a suscité la crainte d'Abdallah, qui a dépouillé Hamza de ce titre en 2004 pour le donner à son fils, aujourd’hui âgé de 26 ans. Il lui fallait donc absolument consolider cette transmission avant que le prince Hamza ne se construise une stature d’alternative au sein de la lignée hachémite.