La mort de Jeffrey Epstein, qui risquait 45 ans de prison, alimente les théories complotistes
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Salomé Legrand, édité par Thibauld Mathieu avec AFP , modifié à
Les secrétaires d'État Marlène Schiappa et Adrien Taquet ont réclamé lundi l'ouverture d'une enquête en France concernant l'affaire Jeffrey Epstein. La France pourrait en effet être concernée.
ON DÉCRYPTE

C'est un suicide mystérieux qui suscite des interrogations au-délà même des États-Unis. Jeffrey Epstein, le milliardaire retrouvé mort en prison samedi alors qu'il était poursuivi pour de multiples agressions sur mineures, a-t-il commis de pareils sévices en France où il séjournait régulièrement ? Les secrétaires d'État Marlène Schiappa, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, et Adrien Taquet, chargé de la protection de l'enfance, ont réclamé lundi l'ouverture d'une enquête en France.

Plusieurs résidences dans l'Hexagone

"L'enquête américaine a mis en lumière des liens avec la France. Il nous semble ainsi fondamental, pour les victimes, qu'une enquête soit ouverte en France afin que toute la lumière soit faite", écrivent les deux ministres dans un communiqué. Selon l'entourage de Marlène Schiappa, il s'agit effectivement d'"éclaircir" les liens que l'homme d'affaires avait avec Paris, comme de nombreux allers-retours entre la France et les États-Unis et la propriété d'un immeuble près de l'Arc de Triomphe, récemment évoqués par la presse française.  

Certaines plaignantes américaines qui dénoncent ces abus sexuels évoquent par ailleurs dans leurs témoignages le fait d'avoir été amenées en France. "La mort de M. Epstein ne doit pas priver les victimes de la justice à laquelle elles ont droit : c'est une condition essentielle à leur reconstruction, c'est aussi une condition à une protection plus efficace à l'avenir d'autres jeunes filles face à ce type de réseaux organisés, face à ce type de prédateurs", écrivent Marlène Schiappa et Adrien Taquet.

Au moins un nom français dans le dossier

Dans une lettre adressée au procureur de la République de Paris et reproduite sur le site de L'Obs, l'association Innocence en danger indique elle avoir adressé un signalement le 23 juillet et souligne que "la France est concernée par ce dossier puisque des investigations menées par le FBI font apparaître plusieurs personnes de nationalité française". Parmi elles, Jean-Luc Brunel, patron de l'agence de mannequins MC2. L'une des victimes présumées, Virginia Giuffre, aujourd'hui âgée de 36 ans, affirme avoir été forcée d'avoir des relations sexuelles avec lui et qu'il aurait mis en relation le financier avec des mineures. 

Pour l'instant, la justice dispose de peu d'éléments, mais Homayra Sellier, présidente de l'association, affirme être en possession de deux témoignages importants : "Pour l'instant, il y a deux personnes qui se sont manifestées de manière anonyme", indique-t-elle à Europe 1. "L'une est une victime, de par sa carrière, de par son passé. L'autre, je ne suis pas sûre qu'elle soit une victime. Je dis qu'elle serait peut-être un témoin".

La justice recoupe les éléments

Contacté par Europe 1, le parquet de Paris indique que les éléments qui lui ont été transmis sont en cours d'analyse et de recoupement, sans préciser de quels éléments il s'agit. Les deux témoins potentiels ne se sont en tout cas pas encore manifestés auprès de la justice française.

Autre difficulté, celle de la qualification d'une éventuelle enquête en France, puisque le suspect principal est mort, ce qui éteint les poursuites. Sauf si la justice a connaissance de tierces personnes qui auraient donc contribué à ce trafic ou en auraient eu simplement connaissance. Dans ce cas, celles-ci pourraient être poursuivies, par exemple, pour non-dénonciation.

La mort dans sa cellule de prison new-yorkaise du financier et figure de la jet set américaine Jeffrey Epstein, 66 ans, a causé la stupeur aux États-Unis et déclenché des enquêtes du FBI et du ministère de la Justice. Sa mort qualifiée d'"apparent suicide" par l'administration pénitentiaire a immédiatement donné lieu à plusieurs théories du complot et à un scandale aux États-Unis, certains croyant plus à un meurtre qu'à un suicide en raison de ses nombreuses connexions dans les cercles du pouvoir.

Il n'appartient pas au gouvernement de décider des "poursuites", recadre Belloubet

La ministre de la Justice a rappelé lundi qu'il n'appartenait pas au gouvernement de décider des "poursuites", après la déclaration des deux secrétaires d'État. "Les poursuites ne sont pas des décisions du gouvernement. Depuis 2013, les instructions individuelles sont prohibées, conformément au principe d'indépendance de l'autorité judiciaire", a souligné Nicole Belloubet, dans un message transmis à l'AFP.