Le contexte. Un rapport d’enquête, rendu public jeudi matin par un magistrat britannique, met directement en cause Vladimir Poutine dans l’empoisonnement de l'ancien officier du FSB Alexandre Litvinenko mort en 2006. A l’époque des faits, cette affaire avait suscité un très grand intérêt médiatique et politique.
Un "teatime" fatal. Tout a commencé le 1er novembre 2006, lorsqu’Alexandre Litvinenko rencontre, dans un hôtel londonien, les Russes Andreï Lougovoï, ex-agent du KGB devenu homme d'affaires, et Dmitri Kovtoun. Dans la foulée, Litvinenko voit aussi l'Italien Mario Scaramella qui lui remet alors un document sur le meurtre de la journaliste russe d'opposition Anna Politkovskaïa. Le soir même, Alexandre Litvinenko commence à se sentir mal.
L’ouverture d’une enquête. Près de trois semaines plus tard, le 19 novembre, Alexandre Litvinenko est hospitalisé en soins intensifs. Une photo de presse le montre le regard vide, ayant perdu ses cheveux. Une enquête est aussitôt ouverte et confiée à la section antiterrorisme de Scotland Yard. Cinq jours après son entrée à l’hôpital, l’ancien agent du KGB meurt.
Les accusations de Litvinenko et le polonium 210. Le lendemain, dans une lettre posthume, Litvinenko accuse le président russe d'être responsable de sa mort. Vladimir Poutine réfute ces accusations dénonçant une "provocation politique".
On apprend très vite que Litvinenko a été empoisonné, selon les conclusions de l'Agence britannique de protection de la santé. L’assassin a utilisé du polonium 210, une substance hautement radioactive. Scotland Yard, qui a enquêté à Moscou jusqu’en décembre 2007, qualifie de "meurtre" la mort de l’ancien agent russe.
Cinq mois après la fin de l’enquête, le parquet britannique entame des poursuites contre l'homme d'affaire Andreï Lougovoï pour le meurtre d’Alexandre Litvinenko. Mais le parquet russe refuse de l’extrader vers la Grande-Bretagne.
Retournement de la situation. Fin mai 2007, rebondissement dans l’affaire : Lougovoï affirme que Litvinenko était un agent des services secrets britanniques et met en cause le MI6 dans son empoisonnement. Les services spéciaux russes décident d’ouvrir une enquête pour espionnage sur la base des déclarations de Lougovoï.
En plein été, à la mi-juillet, le ton monte entre Moscou et Londres. Quatre diplomates russes sont expulsés de Grande-Bretagne. Moscou réplique avec l'expulsion de quatre diplomates britanniques, l'interruption de la coopération dans la lutte antiterroriste et un arrêt des délivrances de visas aux fonctionnaires britanniques.
Puis plus rien pendant sept ans. En janvier 2014, la veuve de l’ancien agent, Marina Litvinenko, dépose une demande devant la Haute Cour de Londres pour forcer le gouvernement à ouvrir une enquête publique. L’accord est annoncé par la ministre de l'Intérieur, Theresa May, le 22 juillet.
Pendant six mois, l’enquête est donc menée. Elle permet d’examiner des documents sensibles à huis-clos. C’est l’examen de ces documents qui a permis, à la justice britannique de conclure à la responsabilité de l'Etat russe dans le meurtre d’Alexandre Litvinenko. Selon les conclusions, ce meurtre a été "probablement approuvé" par Vladimir Poutine. Andreï Lougovoï et Dmitri Kovtoun, avec qui Alexandre Litvinenko a bu un thé et absorbé du polonium 210, sont désignés nommément comme les exécutants du meurtre.