La Russie, qui n'est pas parvenue à convaincre l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) de l'inclure dans l'enquête sur l'empoisonnement de l'ex-espion russe Sergueï Skripal, porte jeudi le dossier devant le Conseil de sécurité de l'ONU.
L'ambassadeur russe auprès des Nations unies, Vassily Nebenzia, a annoncé que la Russie avait demandé une réunion publique du Conseil de sécurité de l'ONU sur l'affaire Skripal jeudi à 15h00 heure locale (19h00 GMT). La Russie souhaite spécifiquement, a-t-il dit, que la réunion porte "sur la lettre de la Première ministre britannique Theresa May" accusant la Russie de l'empoisonnement de Skripal et de sa fille Ioulia. Depuis le début de l'affaire, Moscou nie catégoriquement toute implication dans cette affaire et dénonce "une provocation" occidentale et "une campagne antirusse". Quelques jours après l'empoisonnement, Theresa May l'avait attribué à Moscou, estimant qu'il s'agissait de "la seule explication plausible".
Les diplomates américains expulsés ont quitté la Russie. Devant l'OIAC, la Grande-Bretagne a maintenu mercredi ses accusations contre la Russie. Les représentants des 41 Etats membres du Conseil exécutif de l'OIAC étaient réunis à huis clos au siège de l'organisation à La Haye pour évoquer cette affaire qui est à l'origine des pires tensions Est-Ouest depuis la Guerre froide et d'une vague sans précédent d'expulsions croisées de diplomates. Les diplomates américains expulsés par la Russie et leurs familles ont d'ailleurs quitté leur ambassade de Moscou à bord de plusieurs autobus, jeudi matin, au dernier jour qui leur avait été imparti pour quitter le pays.
Une proposition présentée avec l'Iran et la Chine. Dans une ambiance tendue, la Russie, qui avait demandé la convocation de la réunion, n'a pas pu obtenir de l'OIAC qu'elle l'inclue dans l'enquête sur l'empoisonnement des Skripal. L'ambassadeur russe auprès de l'OIAC, Alexandre Choulguine, avait proposé que la Russie mène une enquête conjointe avec la Grande-Bretagne, sous la médiation de l'OIAC. Mais la proposition russe, présentée conjointement avec l'Iran et la Chine, a été qualifiée d'emblée de "perverse" et de "tentative de diversion" par la délégation britannique, et rejetée lors du vote de l'OIAC.
"Malheureusement, nous n'avons pas pu recueillir deux tiers des voix en faveur de cette motion. Une majorité qualifiée était nécessaire", a déclaré l'ambassadeur russe. "Les masques sont tombés", a-t-il lancé, indiquant que Londres et Washington avaient voté contre la proposition russe ainsi que, "docilement et tenus par la discipline de l'UE et de l'Otan", les Etats membres de ces deux organisations et "quelques alliés des Etats-Unis en Asie".
Poutine veut "que le bon sens l'emporte". Des sources diplomatiques ont indiqué que six pays avaient voté en faveur de la proposition russe, 15 contre et que 17 s'étaient abstenus. A Ankara, où il participait à un sommet sur la Syrie avec ses homologues turc et iranien, le président russe Vladimir Poutine a dit espérer "que le bon sens l'emporte et qu'on arrête d'infliger cet immense préjudice aux relations internationales". La Russie s'estime en effet renforcée par les déclarations du laboratoire spécialisé britannique qui a analysé la substance utilisée et l'a identifiée comme étant du Novitchok, un agent innervant de type militaire de conception soviétique, mais a reconnu ne pas avoir de preuve que la substance ait été fabriquée en Russie.
Sergueï Skripal, 66 ans, et sa fille Ioulia, 33 ans, étaient toujours hospitalisés mardi. L'état de santé de cette dernière "s'améliore rapidement", elle "n'est plus dans un état critique", contrairement à son père, qui est dans un état "stable", selon l'hôpital.