Les réseaux sociaux se déchaînent en Afghanistan contre les anciens interprètes afghans de l'armée française traités d'"infidèles" et de "traitres", obligés pour certains à déménager de nouveau après avoir parlé aux médias des menaces pesant sur eux.
Sérieuses menaces. "Ces interprètes sont des infidèles parce qu'ils ont aidé des infidèles. Ils doivent être punis dans ce monde et au-delà", affirme un internaute sur Facebook en dari (l'une des deux langues officielles d'Afghanistan). "Voici ce qui arrive aux espions : ils doivent mourir", renchérit un autre. "Aux bâtards des Occidentaux, ne vous inquiétez pas : vous finirez par mourir comme des chiens en Afghanistan", lance un troisième.
Ces propos menaçants se veulent une riposte aux informations, de l'AFP notamment, évoquant les menaces des insurgés à l'encontre des anciens interprètes laissés derrière elle par l'armée française quand elle s'est progressivement repliée entre 2012 et 2014. Ils sont accusés parfois de "mentir pour avoir un visa". L'un d'eux, Zabiullah, visé par deux fois par un attentat dans son village au nord de Kaboul, a indiqué samedi à l'AFP qu'il avait dû déménager et quitter la maison familiale pour se réfugier chez un proche à Kaboul. "Des proches m'ont reconnu. Je ne peux faire confiance à personne", confie-t-il au comble de l'anxiété.
Instabilité politique. "Je dois me méfier même des gens de ma propre tribu", a insisté également Bachir, qui appartient à un grand clan patchtoune, communauté à laquelle appartiennent la majorité des talibans et qui a déjà déménagé neuf fois. La situation s'est fortement dégradée dans le pays depuis le départ de la majorité des troupes étrangères, fin 2014). Les insurgés contrôlent environ 40% du territoire national, obligeant les anciens interprètes à quitter leurs villages pour se réfugier en ville.
Une centaine d'interprètes afghans ont bénéficié d'un visa français mais 152 ex-interprètes ou auxiliaires de l'armée, qui ont parfois accompagné les troupes sur le champ de bataille, ont vu leur demande de relocalisation rejetée malgré les menaces dont ils s'affirment victimes. A Paris, le ministère des Affaires étrangères se dit "attentif à la situation individuelle" de ces hommes, sans rouvrir l'examen de leur dossier.