L'interdiction faite aux femmes de conduire, qui était en vigueur depuis des décennies en Arabie saoudite, est levée à partir de ce dimanche, selon une annonce préalable du gouvernement.
Une réforme historique. Mettant fin à une interdiction unique au monde, l'Arabie saoudite autorise à partir de dimanche les femmes à conduire, une réforme historique pour le royaume ultraconservateur mais entachée par des accusations de répression croissante contre les militants des droits de l'homme.
Annoncée en septembre 2017, cette décision inspirée par le prince héritier Mohammed ben Salmane fait partie d'un vaste plan de modernisation du riche pays pétrolier. Elle met fin à une interdiction devenue le symbole du statut inférieur des Saoudiennes, décrié à travers le monde.
Une nouvelle indépendance. Des milliers de conductrices pourraient prendre le volant dimanche, une journée attendue depuis longtemps par les Saoudiennes et qui, pour beaucoup, ferait entrer dans une nouvelle ère la société dans ce royaume régit par une version rigoriste de l'islam.
Pour beaucoup de femmes, saoudiennes ou expatriées, cette mesure permettra de réduire leur dépendance à l'égard des chauffeurs privés ou des hommes de leurs famille, entraînant du même coup des économies financières.
Trois millions de femmes bientôt sur les routes. Plus tôt en juin, le royaume a délivré les premiers permis de conduire à des femmes. Certaines ont échangé leur permis étranger contre un permis saoudien après avoir passé un test. Quelque trois millions de femmes pourraient se voir attribuer une licence et commencer à conduire d'ici 2020, selon le cabinet de consultants PricewaterhouseCoopers. Des auto-écoles pour femmes ont d'ailleurs vu le jour dans des villes comme Ryad et Djeddah.
Une stimulation de l'emploi féminin... Côté économique, les retombées peuvent être bénéfiques, selon des experts. La levée de cette interdiction devrait stimuler l'emploi des femmes, et, selon une estimation de Bloomberg, ajouter 90 milliards de dollars à l'économie d'ici à 2030. Mais nombre de femmes craignent de rester la cible des conservateurs dans un pays où les hommes gardent le statut de "tuteurs" et décident à leur place.
... limité par un islam rigoriste. En effet, les Saoudiennes doivent sortir voilées restent soumises à de strictes restrictions ; elles ne peuvent ni voyager, ni étudier, ni travailler sans autorisation de leur mari ou d'un homme de leur famille, ni manger seules dans un restaurant. Le gouvernement a récemment pris des mesures contre les abus en punissant le harcèlement sexuel de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 300.000 rials (69.000 euros).
Sous l'impulsion du prince Mohammed, devenu héritier du trône il y a un an, le pays a aussi autorisé l'ouverture des salles de cinéma et les concerts mixtes, signe de son intention de revenir à un "islam modéré". Mais l'enthousiasme créé par l'annonce des réformes semble être entaché par une vague de répression contre les militantes qui se sont entre autres longtemps opposées à l'interdiction de conduire. Selon les autorités, neuf de plus d'une dizaine de personnes, dont des femmes, arrêtées sont toujours en prison. Elles sont accusées d'atteinte à la sécurité du royaume et d'avoir aidé les "ennemis" de l'Etat.