La religieuse française Yvonne Pierron, amie de deux autres sœurs assassinées par les militaires argentins au pouvoir entre 1976 et 1983, est décédée à 89 ans dans la province argentine de Misiones, dans le nord-est, où une journée de deuil a été décrétée vendredi.
Deux camarades dénoncées. Installée en Argentine depuis 1955, elle avait réussi à fuir l'Argentine pendant la dictature, sous une fausse identité et se camouflant en voyageant en chaise roulante. Elle n'y était revenue qu'en 1984 à la faveur du rétablissement de la démocratie. Ses camarades religieuses, Léonie Duquet et Alice Domon, n'avaient pas eu cette chance: enlevées en décembre 1977 après une dénonciation de l'ex-capitaine Alfredo Astiz, surnommé "l'ange blond de la mort", elles avaient été jetées vivantes en pleine mer. Astiz a été condamné par contumace en France à la prison à vie pour le meurtre des deux religieuses françaises.
Naturalisée argentine. Née en mars 1928 en Alsace, Yvonne Pierron avait pris la nationalité argentine en 1967 et raconté son expérience sous le régime militaire dans un livre, "Missionnaire pendant la dictature". Un film argentin lui avait été consacré en 2016 et un prix décerné à Misiones, à des personnalités œuvrant dans le domaine social, porte son nom. Installée depuis 1984 dans un petit village perdu de la province, elle y avait fondé un foyer d'accueil pour quelque 120 enfants afin qu'ils puissent aller à l'école.
Décédée dans la nuit de jeudi à vendredi, Yvonne Pierron avait été décorée en 2005 de la légion d'honneur en reconnaissance d'une vie consacrée aux pauvres.