Depuis le scandale Wikileaks, révélé par Julian Assange, d'autres lanceurs d'alerte ont pris la relève. Il y a eu les affaires Luxleaks, puis les Panama Papers. Cette semaine au Luxembourg s'est ouvert le procès de trois lanceurs d'alerte français qui ont fait fuiter 30.000 pages de documents informant sur les pratiques fiscales de multinationales installées au Luxembourg. Poursuivis pour vol domestique, divulgation de secret d'affaire, violation de secret professionnel et blanchiment, ils risquent jusqu'à 10 ans de prison. Juan Branco, conseiller juridique de Julian Assange était invité dans C'est arrivé cette semaine. Pour lui ce procès est révélateur d'un "dysfonctionnement grave".
"Etat complice". "La justice d'un pays peut mettre en danger des personnes jusque parce qu'elles ont révélé que ce pays était en train d'organiser à l'échelle étatique un système de corruption. L'Etat est complice. C'est un énorme scandale. C'est très important de montrer que l'on n'accepte pas ce genre de procès." S'il devait défendre les trois Français, il "refuserait sa légitimité du tribunal à juger ces individus. Je dirai aux juges qu'ils font partie du système qui a été dénoncé." L'avocat souligne qu'en revanche, aucun des pointés du doigts dans ses affaires n'ont été poursuivis.
"L'intérêt général". Faut-il pour autant cautionner ces fuites ? "La limite, c'est l'intérêt général. Ils se sont retrouvés dans une situation où ils pouvaient changer la vie de millions de personnes, en collant des documents sur une clé USB et en les donnant à des journalistes. Après, c'est la liberté de la presse. Si on s'attaque à cette liberté de la presse, on rentre dans un état qui n'est plus démocratique." L'avocat réfute le parallèle avec l'espionnage industriel. "Il y a quand même une immense différence entre transmettre des documents à des journalistes ou à des concurrents."
"Des individus seuls face à des systèmes". Un argument qu'il renforce en arguant que ces divulgations se sont faites sans contre-partie financière. Pour l'avocat, ces lanceurs d'alerte ont mis potentiellement en danger leur carrière et le reste de leur vie pour dénoncer une pratique scandaleuse. "Les sacrifier, c'est donner un exemple catastrophique pour le reste de la société. Il faut protéger ces personnes par la loi, par une jurisprudence." Mardi, Michel Sapin, ministre des Finances français a exprimé sa solidarité à Antoine Deltour, l'un des lanceurs d'alerte de Luxleaks. C'est un peu tard et un peu faible selon Juan Branco. "Ce sont des individus seuls qui s'opposent à des systèmes. Même s'ils sont tort juridiquement, ils ont puissance financière qui permettent d'écraser. C'est à l'Etat de jouer contre-poids et de les protéger."