Le président allemand Joachim Gauck, en déplacement mardi au Chili, a déploré mardi les atrocités commises dans la Colonia Dignidad, lieu de tortures et d'abus sexuels fondé par un ancien nazi et utilisé durant la dictature d'Augusto Pinochet.
Être "du côté des victimes". "Ce que l'Allemagne déplore, c'est que les diplomates allemands aient détourné le regard ou se soient alliés aux bourreaux. Il m'aurait beaucoup plu qu'un ministre des Affaires étrangères allemand tienne des propos clairs à cette époque", a déclaré Joachim Gauck lors d'une conférence de presse au côté de son homologue chilienne Michelle Bachelet. Le chef de l'Etat allemand, un pasteur protestant, a assuré que le cas de Colonia Dignidad ferait figure d'exemple pour les futurs diplomates de son pays afin qu'ils "ne tombent pas dans le piège de rester du côté des bourreaux et soient toujours du côté des victimes".
Esclavage, torture, abus sexuels. Créé en pleine nature dans le sud du Chili en 1961, Colonia Dignidad ou la "colonie de la dignité" se voulait un village familial idyllique. En réalité, son fondateur, un ancien caporal de l'armée nazie, Paul Schäfer a régné avec brutalité sur cette communauté allemande de quelques centaines de personnes, les soumettant à de sévères règles de conduite allant jusqu'à l'esclavage. Il a aussi multiplié les abus sexuels sur les enfants. Après sa fuite en 1997, les Chiliens ont découvert que l'enclave allemande avait aussi été un enfer pour les opposants à la dictature d'Augusto Pinochet, nombre d'entre eux y ayant été torturés ou ayant disparu là-bas.
Plainte collective de victimes. En avril, le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier a annoncé l'ouverture des archives les plus récentes sur la Colonia Dignidad. Quelque 120 anciens habitants de la colonie ont décidé de déposer une plainte collective pour obtenir un million de dollars chacun auprès de l'Etat chilien, accusé d'avoir permis l'existence d'"une des sectes les plus dangereuses de l'histoire de l'humanité", selon leur avocat et ancienne victime, Winfried Hempel. La plainte doit aussi viser l'Etat allemand, auquel il est reproché de ne pas avoir porté secours à ses ressortissants.