L'ex-garde des Sceaux a fustigé sur Europe 1 la politique migratoire très ferme de Donald Trump, qui a néanmoins cédé du terrain mercredi, sous la pression mondiale.
Donald Trump a signé mercredi un décret mettant fin à la séparation des familles de migrants qui ont franchi illégalement la frontière étasunienne avec le Mexique, cette pratique ayant suscité ces derniers jours un vent de critiques contre Washington. "Nous sommes habitué aux revirements du président américain, ce qui est dramatique, tragique même, c'est qu'il s'amuse avec des questions essentielles : la liberté des personnes, l'équilibre des enfants, avec leurs relations affectives. En fait, il s'amuse avec des droits", a relevé Christiane Taubira jeudi, au micro de la matinale d'Europe 1.
Un danger pour les libertés de tous. "Nous sommes submergés de sentiments face à une telle cruauté, un tel cynisme, un tel manque de vergogne", ajoute l'ancienne garde des Sceaux de François Hollande. "Mais l'affaire n'est pas sentimentale, elle est profondément politique parce qu'il est question de droits. Lorsque l'on entame les droits d'une catégorie […] on met en péril les droits et les libertés de tous. C'est un jeu extrêmement dangereux, absolument abject, odieux !", dénonce-t-elle..
L'impuissance des Européens. "Ce qui est dramatique, c'est que la communauté internationale soit à ce point faible, impuissante ou indifférente pour que l'on soit les spectateurs d'une scène abominable où un chef d'Etat se prend pour un bateleur" s'agace encore Christiane Taubira, pour qui l'Europe n'a politiquement pas les moyens de s'opposer clairement aux coups de tête du locataire de la Maison-Blanche. "L'Europe n'est pas une puissance politique, elle doit devenir une puissance politique pour devenir une puissance géopolitique", estime-t-elle, tout en insistant sur la nécessité pour les dirigeants de prendre conscience de l'ampleur du phénomène migratoire, qu'elle refuse de considérer comme une simple "crise".
Repenser le monde. "La crise est un moment paroxystique, une crise qui dure n'est pas une crise, c’est un état nouveau", soutient-elle. "L'état nouveau, c'est une réalité de circulation humaine qui va se poursuivre sous des motifs liés à la guerre, à la misère, à la famine, à la montée des eaux, aux risques de submersion des territoires insulaires, à des bouleversements climatiques, à la volonté d'aller chercher une vie ailleurs", énumère Christiane Taubira, avant de conclure : "Il est inconcevable d'imaginer qu'il suffit de se barricader, ça c'est juste une réponse à la Trump !"