Le Parlement danois a entamé mercredi, dans un hémicycle presque vide, l'examen d'un projet de loi décrié. Le texte prévoit la confiscation des biens des migrants qui arrivent dans le pays. Un texte controversé qui, pourtant, est assuré d'être adopté après un accord entre la majorité de droite et les sociaux-démocrates.
Confiscation des liquidités et des bijoux de valeur. S'il est adopté, il autorisera la police à fouiller les migrants et à confisquer les liquidités excédant 10.000 couronnes danoises (1.340 euros) ainsi que les objets dont la valeur dépasse 10.000 couronnes. Les migrants pourront toutefois conserver les biens "de valeur affective particulière" comme les bijoux, médailles ou portraits de famille. Cette mesure est destinée à couvrir leurs besoins en alimentation et en hébergement.
Les heures sombres de l’Europe. Mais pour beaucoup, comme le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies, le texte risque d'alimenter "la peur et la xénophobie". Ce projet de loi rappelle, pour d’autres, les heures sombres de l’Europe sous occupation nazie.
"Certains Danois, très choqués par ce texte, ont aussitôt répondu avec une ironie noire : "et pourquoi ne pas leur raser la tête aussi, comme pendant la guerre ? "", rapporte la journaliste danoise Solveig Gram-Jensen, correspondante en France pour le quotidien Jyllands-Posten. Le Washington Post avait lui aussi comparé le projet de confiscation à la spoliation des juifs par les nazis.
Une image écornée. Derrière ces réactions cinglantes, c’est la peur de voir l’image du Danemark changer qui s’exprime. "Ce n'est pas juste un simple problème de politique et d'humanité, il en va aussi de la réputation du Danemark à l'étranger", a écrit un groupe de dix élus locaux de Venstre, le parti du Premier ministre Lars Løkke Rasmussen.
Un Danemark moins ouvert. La politique d’accueil du Danemark a récemment changé. "Le Danemark a eu, pendant longtemps, une politique d’accueil très généreuse. Mais cela a commencé à changer en 2001, avec l’arrivée de la droite libérale au pouvoir", explique Solveig Gram Jensen. Depuis, de nombreuses réformes des conditions d'accueil des réfugiés, de plus en plus restrictives, ont été mises en place.
Le Danemark, pays de 5,4 millions d'habitants, a enregistré 21.000 dossiers de demande d'asile en 2015. Ce qui le classe parmi les États membres de l'Union européenne ayant reçu le plus grand nombre de migrants par habitant, derrière la Finlande, l'Autriche, l'Allemagne et la Suède voisine qui en a comptabilisé 163.000.
Que dira l’Union européenne ? Interrogé sur la réaction de Bruxelles, le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans a indiqué : "Nous étudierons la loi une fois qu'elle sera adoptée (...) et nous informerons le gouvernement danois de notre position officielle". Seuls trois partis de gauche y demeurent fermement opposés. Le texte devrait sauf coup de théâtre être voté le 26 janvier, en dépit de protestations qui se font entendre jusque dans les rangs de la majorité.