Alors que l'Allemagne avait été saluée par sa bonne gestion de la crise sanitaire lors de la première vague du printemps, le pays fait face à une "croissance exponentielle" des infections, qui a poussé Angela Merkel a annoncer de nouvelles restrictions. La chancelière avait pourtant tenté dès octobre de durcir les mesures, mais s'était heurtée au refus de certaines régions.
Face à la "croissance exponentielle" des infections au coronavirus à quelques jours de Noël, l'Allemagne serre la vis. Dimanche, la chancelière Angela Merkel a annoncé une batterie de nouvelles restrictions qui resteront en vigueur jusqu'au 10 janvier, faisant entrer son pays dans un confinement partiel, avec notamment la fermeture des commerces "non-essentiels" et des écoles. Un coup dur pour les habitants d'un pays qui avait fait figure de bon élève européen lors de la première vague du printemps, mais qui paye aujourd'hui son retard pris dans les décisions, ainsi qu'un certain relâchement du côté de la population, alors que l'extrême-droite attise la méfiance envers les règles sanitaires dans certaines régions.
La résistance de certains Länder
Angela Merkel avait pourtant alerté dès le mois d'octobre sur l'aggravation de la situation sanitaire. La chancelière, rappelle Hélène Kohl, correspondante d'Europe 1 en Allemagne, était "partisane dès la mi-octobre d'un confinement beaucoup plus strict. Mais l'Allemagne est un pays fédéral, elle ne peut pas décider toute seule, et doit consulter les présidents des 16 Länder". Or, Angela Merkel s'est à ce moment-là heurtée au refus des régions les moins touchées.
Un retard dans les décisions que le pays paye cher. Pour Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale à la faculté de médecine de l'université de Genève, la situation allemande est "l'exemple même de tout retard qui est extrêmement préjudiciable à la situation sanitaire, mais aussi à la vie sociale et économique". Ainsi, rappelle-t-il, "les Irlandais, qui ont commencé le 21 octobre à confiner de façon assez stricte, ont complètement repris le contrôle sur l'épidémie".
Un relâchement de la population
Par ailleurs, a-t-on noté un relâchement des précautions du côté des habitants outre-Rhin ? Peut-être, répond Hélène Kohl. "En réalité, les Allemands ont profité de toute la liberté qui leur a été laissée", ajoute-t-elle, prenant l'exemple des petits arrangements avec les règles adoptés par beaucoup de restaurants depuis le 1er novembre, et l'annonce de la fermeture des restaurants, bars, institutions culturelles et enceintes sportives. "On a vu fleurir un peu partout des offres alternatives, avec un restaurant qui ouvre ses fenêtres et devient un stand de vin chaud", raconte la correspondante d'Europe 1. A Berlin, par exemple, "dans certaines rues, on se retrouve avec quasiment tous les restaurants ouverts et des gens qui s'attroupent pour boire un vin chaud, en enlevant le masque".
Des bastions d'extrême-droite sensibles au complotisme
Enfin, comme dans beaucoup de pays, l'Allemagne doit composer avec une partie de sa population peu encline à se plier aux instructions. "Il y a ce mouvement des récalcitrants qui ne croient pas à la dangerosité du virus, qui est bien installé en Allemagne", explique Hélène Kohl. "Certes, ça correspond à 5-10% de la population, mais dans certaines régions dans l'est du pays, c'est un mouvement qui est porté par l'extrême-droite, et les régions où on vote le plus à l'extrême-droite sont celles qui dérapent."
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En effet, ces bastions d'extrême droite figurent parmi les zones les plus touchées, comment par exemple la Saxe, où le taux d'incidence est le plus élevé d'Allemagne. Ce même Land avait placé en 2017 l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) en tête (27%), et donné au parti d'extrême droite son meilleur score fédéral. Parmi les partis allemands, l'AfD est le seul à avoir affiché son scepticisme, voire son opposition aux restrictions. Plus d'un électeur sur deux de l'AfD (56%) juge excessives les mesures de restriction, selon un récent sondage Forsa.