Un an après le séisme du référendum britannique, les négociations du Brexit démarrent officiellement lundi à Bruxelles, où les Européens craignent que la fragilité du gouvernement de Theresa May ne complique ces tractations historiques.
"Des négociations qui vont façonner le futur de l'UE et du Royaume-Uni". "Le coup d'envoi sera donné par le négociateur en chef de l'Union européenne (UE), le Français Michel Barnier, et le ministre britannique du Brexit David Davis aux alentours de 11h00 dans les locaux du Berlaymont, le siège de la Commission européenne.
"C'est le début de négociations qui vont façonner le futur de l'UE et du Royaume-Uni", a déclaré David Davis, dans un communiqué publié avant son arrivée à Bruxelles. "La route est encore longue, mais notre destination est claire: un partenariat profond et spécial entre le Royaume-Uni et l'UE, un accord comme aucun autre dans l'Histoire".
Organiser les négociations. Mais la réunion de lundi ne devrait pas aborder ces lointaines perspectives. Elle sera d'abord consacrée à l'organisation pratique des négociations complexes d'un "retrait en bon ordre" du Royaume-Uni, prévu fin mars 2019, après plus de 40 ans d'une adhésion tumultueuse à l'UE.
Également au menu, les trois dossiers que les 27 pays restant dans l'UE ont définis comme prioritaires : le sort des expatriés européens au Royaume-Uni et des Britanniques dans l'UE, l'avenir de la frontière irlandaise et le "règlement financier" des engagements de Londres envers l'Union, évalué jusqu'à 100 milliards d'euros.
"Des clashs sous contrôle". "Le fait qu'ils viennent, qu'ils acceptent de parler des sujets qu'on a définis, ça montre que les "clashes" sont sous contrôle", a expliqué un diplomate européen de haut rang.
Les Britanniques voulaient discuter dès le départ de leur "relation future" avec l'UE, notamment sur le plan commercial. Mais ils semblent avoir accepté le tempo des Européens, qui n'accepteront de parler de l'avenir que quand des "progrès suffisants" auront été enregistrés pour leurs trois priorités.
Les négociateurs veulent montrer qu'ils ne vont pas "d'un désastre à l'autre". "Le meilleur moyen de passer cette semaine est de reconstruire la confiance, de lancer un processus constructif sans trop de feux d'artifice", analyse un haut responsable européen, jugeant que les deux parties ont "un intérêt commun cette semaine : montrer que nous n'allons pas d'un désastre à un autre".
Côte britannique, les difficultés du gouvernement s'accumulent en effet. Désignée en juillet 2016 par le Parti conservateur pour remplacer l'initiateur du référendum David Cameron, la Première ministre Theresa May est très fragilisée. Elle a perdu sa majorité absolue au Parlement à la suite de législatives anticipées le 8 juin, qu'elle avait elle-même voulues pour renforcer son assise lors des négociations du Brexit.
Une "insécurité" chez les Européens. "Il y a une énorme insécurité chez les Européens qui se demandent combien de temps elle va tenir", confie un diplomate de haut rang, considérant qu'un interlocuteur affaibli ne peut que nuire aux négociations.
"Il y a eu une surestimation sur le continent" de l'impact du revers électoral de Theresa May, estime-t-il, doutant qu'il ne la conduise à revenir sur sa vision d'un Brexit "dur", synonyme notamment d'une rupture totale avec le marché unique européen.
May préférerait "aucun accord à un mauvais accord". Theresa May, qui a plusieurs fois dit préférer "aucun accord plutôt qu'un mauvais accord" avec l'Union européenne, aura l'occasion de préciser elle-même ses plans devant les 27, lors d'un sommet européen prévu jeudi et vendredi à Bruxelles.
Les Européens ont eu vent d'une "offre généreuse" qu'elle s'apprêtait à leur faire sur le sort des plus de trois millions de ressortissants européens installés au Royaume-Uni. Mais ils lui ont conseillé de reporter son initiative, selon un haut responsable européen.
"Beaucoup craignent que ce qu'elle présente comme une "offre généreuse" ne soit pas vu comme très généreuse, ce qui pourrait créer une très mauvaise atmosphère", argue-t-il.