Menaces économiques américaines et bruit de bottes russes : Washington a insisté mardi sur les sanctions que subirait la Russie, et Vladimir Poutine lui-même, en cas d'invasion de l'Ukraine, tandis que Moscou a lancé des manoeuvres militaires aux portes du pays. A une journaliste qui lui demandait mardi s'il pouvait envisager de sanctionner personnellement le président russe, Joe Biden a répondu "Oui", puis "Je peux le concevoir".
Pas de forces américaines déployées en Ukraine
Si la Russie "envahit tout le pays", ou "même beaucoup moins" que cela, il y aura "d'énormes conséquences" et cela "changerait le monde", a encore indiqué le président américain. Qui a toutefois fixé, une nouvelle fois, les limites de toute riposte américaine : "Nous n'avons pas l'intention de déployer des forces américaines ou de l'Otan en Ukraine", qui n'est pas membre de l'alliance militaire occidentale. Sur le plan économique en revanche, les Etats-Unis sont prêts à taper fort. "Il n'est plus question de réponse graduée. Cette fois nous commencerons d'emblée par le haut de l'échelle" des sanctions, a dit un haut responsable de la Maison Blanche mardi.
Washington cherche à renverser le rapport de force instauré par Vladimir Poutine. Accusé d'avoir massé plus de 100.000 militaires à la frontière de l'Ukraine, le président russe veut bousculer l'emprise américaine sur l'équilibre militaire et stratégique en Europe, et particulièrement à l'Est.
Après avoir mis en alerte 8.500 militaires susceptibles de renforcer très rapidement les rangs de l'Otan, les Etats-Unis ont mis en scène mardi une livraison d'équipement militaire à l'Ukraine. Washington a également averti le Bélarus qu'il s'exposait à une riposte "rapide" et "ferme" s'il laissait la Russie utiliser son territoire pour attaquer l'Ukraine. Les forces armées russes ont quant à elles lancé mardi une nouvelle série de manoeuvres à proximité de l'Ukraine et en Crimée annexée. Pour le Kremlin, c'est Washington qui provoque une nouvelle "exacerbation", que ce soit en mettant des troupes en alerte ou en rapatriant des familles de diplomates américains d'Ukraine, une initiative imitée mardi par le Canada.
Technologie, dollars, gaz
Washington envisage, selon le haut responsable de la Maison Blanche, d'interdire l'exportation vers la Russie de technologie américaine. Les Etats-Unis menacent aussi d'asphyxier les banques russes en leur interdisant les transactions en dollars, devise reine des échanges internationaux. Quant aux éventuelles sanctions contre Vladimir Poutine lui-même, Joe Biden n'a pas précisé leur nature. Lorsque Washington sanctionne des personnalités étrangères, cela passe, le plus souvent, par un gel de leurs avoirs et une interdiction de transaction avec les Etats-Unis.
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Reste un point extrêmement délicat, susceptible d'entamer la cohésion entre Occidentaux: les hydrocarbures russes. Les Européens craignent, en cas d'escalade, d'être privés en plein hiver du gaz russe, qui couvre plus de 40% de leurs besoins. "Nous pensons être prêts à trouver des approvisionnements alternatifs couvrant une majorité significative des potentielles coupes" dans la livraison de gaz russe, a promis le haut responsable américain. La Maison Blanche a annoncé mardi, fort à propos, que Joe Biden recevrait le 31 janvier l'émir du Qatar. Cet allié des Etats-Unis a d'immenses réserves de gaz naturel. Il est aussi le premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié.
Une réponse écrite aux Russes
La Russie, considérée comme marraine des séparatistes pro-russes que Kiev combat dans l'est du pays depuis huit ans, dément tout projet d'offensive, mais lie une désescalade à des traités figeant l'Otan, de manière à ce que l'Ukraine en particulier n'y adhère jamais. La demande est jugée inacceptable en Europe comme en Amérique. Mais Washington a néanmoins promis de remettre cette semaine une réponse écrite aux Russes.
Dans ce pas de deux entre les Etats-Unis et la Russie, voulu par Vladimir Poutine, les Européens cherchent à se faire entendre. "La discussion entre les Etats-Unis et la Russie est-elle une bonne chose? Oui. Cette discussion a-t-elle donné des résultats concrets? Je n'en ai pas vu", a lancé le président français Emmanuel Macron, décidé à avoir son propre canal de communication avec Vladimir Poutine.
Il aura vendredi un entretien téléphonique avec son homologue russe. "S'il devait y avoir une agression" de la Russie contre l'Ukraine, "la riposte sera là et le coût sera très élevé", a toutefois averti mardi le dirigeant français, affichant sa cohésion avec les Américains en la matière. Washington lui a rendu la politesse. "Nous soutenons tout ce qui pourrait réellement réduire les tensions", a dit mardi le porte-parole du département d'Etat, assurant que le "degré de coordination entre les Français et les Etats-Unis était excellent".