L'histoire se répète : dépassée par l'afflux de migrants illégaux, l'Italie estime ne plus pouvoir supporter seule cet effort et demande à l'Europe de la soutenir. Sauf que cette fois-ci, le Premier ministre italien a décidé de hausser le ton. Matteo Renzi a en effet menacé dimanche de mettre en place un "plan B" qui ferait surtout "mal à l'Europe" si l'Italie n'est pas mieux soutenue par l'UE pour faire face à l'afflux de migrants.
L'Italie irritée par ses voisins. L'Italie se débat pour accueillir des vagues successives de migrants et la situation s'est envenimée avec ses voisins européens au cours des derniers jours lorsque les migrants ont été refoulés aux frontières avec la France et l'Autriche. La crise "ne doit pas être sous estimée. C'est un problème sérieux et, que ce soit bien clair, les réponses de l'Europe n'ont pas jusqu'à maintenant été suffisamment bonnes", a déclaré Matteo Renzi dans un entretien au Corriere della Sera.
L'UE a du mal à réunir un consensus autour de son programme de répartition des migrants - qui prévoit de répartir 24.000 réfugiés entre les autres pays que l'Italie et la Grèce - mais l'Italie espère que le sommet européen du 25 juin permettra d'aller encore plus loin. "Répartir seulement 24.000 personnes, c'est presque de la provocation", a déclaré Matteo Renzi. "Si l'Europe choisit la solidarité, c'est bien. Si elle ne le fait pas, nous avons un "plan B" tout prêt. Mais qui frapperait surtout l'Europe en premier", a-t-il dit sans plus de précisions. Plus de 57.000 migrants et demandeurs d'asile ont été secourus en mer et accueillis par l'Italie depuis le début de cette année, contre 54.000 à la même époque de l'année 2014, a-t-il souligné.
Une réunion prévue à Milan. Le Premier ministre qui abordera la question de l'immigration avec ses homologues britannique et français cette semaine à Milan, a ajouté qu'il s'entretiendrait aussi avec le chef de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et la Chancelière allemande Angela Merkel. La Commission européenne a demandé en mai aux Etats membres de l'UE de prendre en charge 40.000 demandeurs d'asile arrivés en Italie et en Grèce. Mais les Etats peinent à s'entendre sur le sujet.
La Convention de Dublin prévoit que les demandeurs d'asile déposent leur demande dans le pays d'entrée en Europe - une règle que l'Italie estime injuste puisqu'elle laisse Rome se débrouiller seule avec les milliers de migrants qui envahissent ses côtes. La Grèce se plaint depuis longtemps elle aussi d'être abandonnée face au même problème. Les accords de Schengen prévoient que les migrants arrivant en Italie peuvent habituellement facilement traverser les pays voisins : France, Autriche, Suisse et Slovénie pour se rendre en Grande-Bretagne, en Allemagne et dans les pays scandinaves. Mais la France a bloqué ce weekend à sa frontière avec l'Italie plus de 200 migrants candidats à l'immigration vers l'Europe du Nord.
La convention de Dublin "devrait être modifiée", a estimé Matteo Renzi soulignant que le chaos qui règne actuellement en Libye - d'où partent de nombreux bateaux de migrants - relève de "la responsabilité de l'Europe compte tenu de l'intervention (militaire) lancée il y a quatre ans" par l'Otan pour aider les rebelles à renverser Mouammar Kadhafi. L'Allemagne avait indiqué fin mai rétablir temporairement des contrôles à ses frontières pour assurer la sécurité du G7 des 7 et 8 juin mais cette entorse à la libre circulation n'avait officiellement pas de lien avec l'immigration.