Des profils expérimentés et de la diversité : quelle équipe pour gouverner avec Joe Biden ?

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Didier François, avec AFP, édité par Mathilde Durand , modifié à

Joe Biden, 46e président des Etats-Unis, souhaite incarner l'unité du pays et le changement de méthode politique après les années Trump. Son équipe ministérielle, qui doit encore être validée par le Senat, a été sélectionnée avec soin. Des profils qui incarnent la diversité mais aussi la compétence et l'expérience, quitte à risquer le conformisme.

Joe Biden a officiellement été investi 46e président des Etats-Unis au cours d'une cérémonie marquée par le Covid-19 et par une sécurité maximale. Après quatre ans de mandat de Donald Trump, le président démocrate veut marquer son changement de méthode. Il a déjà choisi son équipe pour constituer son cabinet, qui devra être confirmée par le Sénat après auditions. Des profils d'hommes et de femmes fidèles, expérimentés, divers et qui ont pour certains déjà assumé des responsabilités sous l'administration Obama.

"La compétence" et la diversité

"Il a choisi la compétence", confirme Didier Combeau, politologue, spécialiste des États-Unis, chercheur associé à l'Institut des Amériques, sur Europe 1. Premier exemple : le nouveau secrétaire d'Etat, Antony Blinken, 58 ans, ancien numéro deux de la diplomatie américaine sous Obama, après avoir fait ses classes au Conseil national de sécurité. "Il a choisi aussi une équipe très diverse", ajoute le politologue. Outre le choix fort de Kamala Harris comme vice-présidente (première femme à ce poste), le nouveau locataire de la Maison-Blanche a également fait le pari d'une équipe ressemblant à l'Amérique.

Lloyd Austin devrait devenir le premier Afro-Américain à occuper le poste de secrétaire à la Défense. Alejandro Mayorkas, d'origine cubaine, est choisi comme secrétaire à la Sécurité intérieure. Deb Haaland devrait être la première Amérindienne à occuper un poste ministériel en prenant la tête du secrétariat de l'Intérieur. Le président Biden a également sélectionné Pete Buttigieg, ancien candidat à la primaire démocrate, comme secrétaire d'Etat aux Transports. Un signe fort envers la communauté LBGT car il devrait devenir le premier ministre ouvertement homosexuel aux Etats-Unis.

Autre nomination symbolique, celle de Janet Yellen à la tête du Trésor, 74 ans et ancienne présidente de la Banque centrale américaine (Fed). "Elle est peut-être moins inféodée à Goldman Sachs que les autres secrétaires au Trésor, y compris ceux de Barack Obama et de Bill Clinton, même si elle a perçu des sommes importantes lorsqu'elle donnait des discours", analyse Anne Deysine, juriste et politologue, professeure émérite à l'université Paris Nanterre, et autrice de "Les Etats-Unis et la démocratie". "Cela peut être une bonne nouvelle pour l'aile gauche du parti démocrate".

Attention au "conformisme" et au retour aux affaires du "blob"

Ces choix, qui jurent avec les '"francs-tireurs" de l'administration précédente, sont assumés par le président démocrate. Joe Biden les justifie par son besoin d'avoir "une équipe composée d’individus expérimentés, habitués à la gestion de crises, prête à fonctionner dès le premier jour". Mais ils comportent néanmoins quelques "risques". A Washington, on indique déjà que c'est le retour aux affaires du "blob", un terme qui désigne les énarques à l'américaine, l'establishment de la capitale fédérale. Une caste de haut-fonctionnaires, à la carrière reconnue qui naviguent entre privé et public au gré des alternances politiques.

A l'image du futur secrétaire d'Etat, Antony Blinken, qui a fondé un cabinet huppé d'analyse de risques géopolitiques, dans lequel travaillait également le général Lloyd Austin, ancien vice-chef d'état-major et patron de Centcom, le plus important des commandements opérationnels de l'armée américaine. Même profil type pour Avril Haines, ancienne directrice adjointe de la CIA, promue à la coordination nationale du renseignement, pour Richard Burns, diplomate d'expérience qui prend la CIA ou pour Jack Sullivan, patron du Conseil national de sécurité.

"Ils ont travaillé ensemble autour de Joe Biden, ils se connaissent donc cela va être fluide contrairement au mode de fonctionnement complétement erratique, aux départs et arrivées comme dans un moulin, sous Trump", analyse Yannick Mireur, politologue et spécialiste des USA. "On ne peut efface les secousses et surtout les problèmes que Trump a soulevés, par exemple sur la Chine, les politiques commerciales, les cols bleus", souligne-t-il néanmoins. "Il faut aussi éviter le piège du conformisme, c'est-à-dire des gens trop formatés par les grandes écoles, leurs expériences à Washington et qui ne sont pas assez créatifs."