La police a interpellé dimanche plus de 4.800 personnes en Russie lors d'une nouvelle journée de manifestations pour exiger la libération de l'opposant Alexeï Navalny. Les États-Unis et l'Union européenne ont aussitôt condamné ces arrestations.
La police russe a procédé dimanche à plus de 4.800 interpellations et bloqué le centre de plusieurs villes, dont Moscou, au cours de nouvelles manifestations exigeant la libération de l'opposant Alexeï Navalny. Ces arrestations ont été immédiatement condamnées par les Etats-Unis, l'Union européenne et le Canada.
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken regretté les "tactiques brutales" de la police contre des "manifestants pacifiques", la diplomatie russe dénonçant quant à elle l'"ingérence grossière" des Etats-Unis dans ses "affaires intérieures".
Le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell, a "déploré les interpellations massives" et "l'usage disproportionné de la force" contre les manifestants et les journalistes. "Les gens doivent avoir la possibilité d'exercer le droit de manifester sans crainte de répressions", a-t-il déclaré sur Twitter. "Nous exhortons la Russie à libérer les personnes détenues, à respecter ses engagements internationaux et à protéger la liberté de la presse", a réagi le chef de la diplomatie canadienne Marc Garneau dans un tweet.
Le centre de Moscou bouclé
Dans la capitale russe, recouverte par une fine couche de neige, manifestants et policiers antiémeutes présents en masse ont joué au chat et à la souris toute la journée de dimanche, au rythme des consignes édictées sur les réseaux sociaux par l'équipe d'Alexeï Navalny. Le centre de Moscou a été totalement bouclé, à commencer par la place de la Loubianka, où se trouve le siège des services de sécurité (FSB), devant lequel les protestataires espéraient à l'origine se rassembler.
Face aux barrages de la police, qui a aussi fermé plusieurs stations de métro, ils ont préféré se diriger vers le centre de détention dans lequel est emprisonné Alexeï Navalny, mais sans y parvenir pour la plupart, avant de rejoindre à nouveau le centre-ville. Les journalistes de l'AFP ont vu des milliers de manifestants défiler en plein coeur de Moscou en scandant "Poutine est un voleur !" ou encore "Liberté !", bien que leur nombre exact soit difficile à évaluer en raison du désordre ambiant.
"Nous leur avons montré à quel point nous étions nombreux"
En début de soirée, l'équipe d'Alexeï Navalny a annoncé la fin de la manifestation à Moscou. "Nous leur avons montré à quel point nous étions nombreux !", a-t-elle lâché sur Telegram, appelant les partisans de l'opposant à aller le soutenir au moment de sa comparution devant un tribunal mardi.
D'après l'organisation OVD-Info, spécialisée dans le suivi des manifestations, au moins 4.818 personnes ont été interpellées dans 85 villes, mais principalement à Moscou (1.515) et Saint-Pétersbourg (1.097). Samedi dernier au cours des précédents rassemblements, plus de 4.000 personnes avaient été arrêtées et une vingtaine d'affaires pénales ouvertes. La femme d'Alexeï Navalny, Ioulia Navalnaïa, a notamment été interpellée par la police avant d'être relâchée quelques heures plus tard.
Selon l'union des journalistes russes, au moins 60 membres de la presse ont été arrêtés. A Saint-Pétersbourg, une autre place forte de l'opposition, près de 3.000 personnes rassemblées sur une place du centre-ville ont été dispersées par les forces antiémeutes. En Sibérie, à Novossibirsk, la troisième agglomération de Russie, le média indépendant Taïga a évalué à plus de 5.000 le nombre des protestataires, l'un des plus importants rassemblements antigouvernementaux de ces dernières années.
Navalny visé par plusieurs procédures judiciaires
Alexeï Navalny est la cible de multiples procédures judiciaires, qu'il considère comme ayant un caractère politique. Les actions de protestations sont aussi alimentées par la diffusion d'une enquête de son équipe accusant le président Vladimir Poutine de bénéficier d'un immense "palais" sur les rives de la mer Noire, ce que l'intéressé dément.
Militant anticorruption et ennemi juré du Kremlin, Alexeï Navalny, 44 ans, est retourné en Russie le 17 janvier après des mois de convalescence en Allemagne pour un empoisonnement présumé dont il accuse Vladimir Poutine et les services de sécurité russes d'être les responsables.