Des étudiants de l'université Columbia à New York, d'où est parti un mouvement étudiant pro-palestinien aux Etats-Unis, ont occupé un bâtiment durant la nuit de lundi à mardi, bravant un ultimatum pour cesser leur mouvement. De son côté, l'ONU s'est dite mardi "inquiète" des actions de la police sur des campus d'université aux Etats-Unis. "Je m'inquiète de ce que certaines mesures prises par les forces de l'ordre dans une série d'universités semblent avoir un impact disproportionné", a déclaré le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk.
"Sauf par la force"
Le Haut-Commissaire s'est dit troublé "par une série de mesures musclées prises pour disperser et démanteler les manifestations", soulignant que "la liberté d'expression et le droit de réunion pacifique sont fondamentaux". Columbia a commencé lundi soir à sanctionner des étudiants refusant de quitter, "sauf par la force", un campement installé depuis dix jours. Durant la nuit, des manifestants se sont barricadés dans le bâtiment Hamilton et d'autres l'ont entouré d'une chaîne humaine à l'extérieur, selon une vidéo postée sur les réseaux sociaux.
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"Les membres de la communauté de Columbia ont repris Hamilton Hall juste après minuit", a déclaré dans un communiqué le groupe étudiant Columbia University Apartheid Divest. Ils l'ont renommé "Hind's Hall" en l'honneur d'une fillette de six ans, Hind, tuée durant la guerre à Gaza. "Prendre le contrôle d'un bâtiment est un petit risque comparé à la résistance quotidienne des Palestiniens à Gaza", ajoute le groupe.
"Protéger le campement"
"Nous avons commencé à suspendre (administrativement) des étudiants, dans le cadre de cette nouvelle étape pour assurer la sécurité de notre campus", avait annoncé à la presse lundi soir le vice-président chargé de la communication de Columbia, Ben Chang. Après un week-end relativement calme sur le campus, où est installé un "village" de tentes, la présidente de Columbia Minouche Shafik a lancé lundi un ultimatum expirant à 18H00 GMT. Elle a exhorté 200 occupants d'un campement à partir, à la suite de l'échec de cinq jours de négociations pour une solution à l'amiable.
Ces étudiants et militants pro-palestiniens exigeant que Columbia, université privée, coupe les ponts avec des mécènes ou entreprises liés à Israël, avaient alors appelé à "protéger le campement". "Nous ne serons pas délogés, sauf par la force", a crié lors d'un point de presse Sueda Polat, une dirigeante étudiante du mouvement. Une journaliste de l'AFP a dénombré une cinquantaine de personnes restantes lundi soir dans le petit campement dans une atmosphère détendue et sans présence policière.
Columbia avait assuré vendredi qu'elle ne ferait pas appel à la police de New York pour évacuer les tentes. Mais pour Joseph Howley, professeur à Columbia, l'ultimatum lancé par la présidente Shafik équivaut à "céder aux pressions politiques externes".
Guerre du Vietnam
La vague de protestation contre la guerre que conduit Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza s'étend dans les universités américaines depuis dix jours. Le mouvement est parti de Columbia où cent personnes avaient été interpellées le 18 avril. Depuis, des centaines d'autres - étudiants, enseignants et militants - ont été interpellées, parfois arrêtées et poursuivies en justice dans plusieurs universités du pays. Les images de policiers anti-émeutes intervenant sur les campus, à la demande des universités, ont fait le tour du monde, rappelant des événements similaires aux Etats-Unis lors de la guerre du Vietnam.
Les manifestations ont ravivé le débat tendu depuis l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre, sur la liberté d'expression, un droit constitutionnel et des allégations d'antisémitisme. Cet hiver, les deux présidentes d'universités de Harvard et de UPenn ont dû démissionner après avoir été accusées devant le Congrès à Washington de ne pas faire assez contre l'antisémitisme. D'un côté, des étudiants et enseignants accusent leurs universités de chercher à censurer la libre expression politique, de l'autre plusieurs personnalités, dont des élus républicains, estiment que les militants attisent l'antisémitisme. Des étudiants juifs ont rejoint les rangs des mobilisations pro-palestiniennes.
"Aucun campement" autorisé au Texas
Au cours du week-end, plus de 350 personnes ont été interpellées dans plusieurs universités à travers le pays et le campement de Boston a été démantelé. A l'université du Texas à Austin, un campement a aussi été démantelé et quelques personnes interpellées. Lundi, la police a utilisé des bombes lacrymogènes au poivre. "Aucun campement ne sera autorisé", a déclaré le gouverneur conservateur du Texas, Greg Abbott, sur les réseaux sociaux. L'avocat Paul Quinzi, qui défend à Austin des personnes détenues, a estimé pour l'AFP "à au moins 80 le nombre d'arrestations" qui "continuent".
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A la Virginia Commonwealth University (VCU) de Richmond (nord-est), la police a poussé dehors des manifestants, selon des images des télévisions locales. Des étudiants ont accusé les forces de l'ordre d'avoir utilisé des gaz lacrymogènes. La direction a déclaré sur X avoir donné à plusieurs reprises aux manifestants, "dont beaucoup n'étaient pas des étudiants", des possibilités de quitter les lieux et "ceux qui ne l'ont pas fait ont été arrêtés et sont en infraction".
La guerre a été déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien qui a entraîné le massacre de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP à partir de données officielles israéliennes. En représailles, Israël a promis de détruire le mouvement islamiste et sa vaste opération militaire dans la bande de Gaza a fait 34.535 morts, majoritairement des civils, selon le Hamas.