Les flèches contre Donald Trump viennent même de son propre camp. Bob Corker et Jeff Flake, deux sénateurs républicains, ont vivement critiqué le président américain, mardi, dénonçant un homme "dangereux pour la démocratie" et adepte des "contre-vérités". Ces spectaculaires saillies contre Trump cachent-elles un début de fronde au sein du Grand Old Party ? Pas selon Jean-Eric Branaa, spécialiste des États-Unis. "L’électorat suit Trump et ne suit plus le parti républicain. Le parti a donc intérêt à suivre Trump et à ne plus rien dire contre lui", a analysé le maître de conférence à Paris 2, interrogé par Europe 1.
"Les électeurs républicains sont derrière Trump." Les critiques de ces deux sénateurs ont malgré tout surpris tout Washington. La journée de mardi, censée refléter l’unité du parti républicain pour promouvoir un projet de grande baisse d’impôts, a vite tourné au règlement de comptes. Ces sénateurs forment désormais, avec John McCain, une sorte de trio tenant tête au successeur de Barack Obama. En rompant avec lui au nom des principes, ils font pression sur leurs collègues, qui jusqu'à présent ont préféré faire le dos rond face aux excès présidentiels et rester ostensiblement concentrés sur le fond des réformes. Même l'ancien président George W. Bush, dans des termes à peine voilés, a la semaine dernière exprimé son inquiétude face à la "cruauté" et "l'intolérance" ambiantes.
Mais, malgré les critiques de ces figures du parti républicain, peu d’élus osent s’opposer frontalement au président américain. "Trump a le pouvoir parce que les électeurs républicains sont derrière lui à plus de 80%. Au contraire, la cote de popularité des parlementaires est très basse, proche des 15%. Les parlementaires dépendent énormément de Trump. Le parti républicain traditionnel n’existe plus, c’est un parti républicain trumpiste", poursuit le spécialiste des États-Unis.
"Trump n’a pas à craindre le parti républicain." L'atmosphère est donc loin d'être apaisée alors que s'ouvre le chantier le plus crucial de la fin d'année : la réforme de la fiscalité. Après l'échec de l'abrogation de la réforme de la couverture-maladie de Barack Obama, les républicains n'ont pas le droit à l'erreur. Ils ont aussi en ligne de mire les élections de mi-mandat, en novembre 2018, pour lesquels Donald Trump compte promouvoir uniquement des candidats favorables à ses réformes.
"Ce mouvement va s’amplifier. Il y aura des candidats trumpistes aux prochaines élections. Tout ce que le parti républicain a construit avant Trump s’est écroulé. Il n’a pas à craindre le parti républicain", estime Jean-Eric Branaa. Le président américain n'a cependant pas le contrôle total sur son parti. Le 27 septembre dernier, les républicains de l'Alabama ont infligé un camouflet à Donald Trump en rejetant son candidat au Sénat, lui préférant un magistrat ultra-conservateur. Le feu a beau être circonscrit au sein du Grand Old Party, les braises ne sont pas encore totalement éteintes.