Cinq militaires américains appartenant au corps d’élite des Marines ont été abattus jeudi par un tireur solitaire lors d’une double fusillade dans un centre de recrutement de l’armée et un centre de réservistes de l'US Navy, distants d’une dizaine de kilomètres, à Chattanooga, dans le Tennessee. Mohammod Youssuf Abdulazeez, l’auteur présumé de ces faits qualifiés de "terrorisme intérieur" par le procureur fédéral de la région, a été tué par la police puis identifié par le FBI, chargé de l’enquête. Les enquêteurs s'intéressaient vendredi à un déplacement en Jordanie du tireur pour tenter d'expliquer le geste du jeune homme qui avait échappé à toute surveillance.
Une famille normale et appréciée. Ce jeune Américain de 24 ans habitait, avec sa famille dans la tranquille banlieue de Chattanooga, à Hixson. C’est dans cette ville d'environ 160.000 habitants que vivait Mohammod Youssuf Abdulazeez depuis l’école primaire, selon Times Free Press. L’une de ses anciennes camarades de classe, Kagan Wagner, citée par le journal local Chattanooga Times Free Press, a confié que la famille Abdulazeez "était la famille moyenne de Chattanooga".
Le père, qui porte le même nom que son fils, travaille d’ailleurs pour la municipalité et est qualifié par l’un de ses collègues comme un bon travailleur n’ayant jamais causé ou eu de problèmes, rapporte Times Free Press. Quant au jeune suspect, il n’avait eu affaire à la police qu’une fois auparavant : le 20 avril dernier, il avait été arrêté pour conduite sous l'influence de l'alcool et de la drogue.
Son père, surveillé par les services de sécurité. Né au Koweït, Mohammod Youssuf Abdulazeez a été naturalisé américain, a indiqué une source fédérale au New York Times. sa mère serait Koweïtienne et son père Palestinien, rapporte le site américain SITE. Ce dernier a fait l'objet d'une enquête, il y a plusieurs années, pour "de possibles liens avec une organisation terroriste étrangère", écrit par ailleurs le New York Times, citant des sources proches des services de sécurité. Son nom figurait sur une liste de suspects à surveiller, dont il a été rayé par la suite et l'enquête n'a rien révélé sur son fils.
Un jeune ingénieur qui "s'entendait avec tout le monde". Selon la chaîne locale WRCB, le jeune homme avait décroché en 2012 un diplôme d'ingénieur à l'université du Tennessee, à Chattanooga. L'établissement a bien confirmé sur Twitter que le tireur était l'un de ses anciens élèves. Une page Facebook semblant appartenir à sa mère montre le jeune homme heureux à sa cérémonie de remise de diplôme, alors qu'il enlace une femme plus âgée portant des fleurs et un keffieh. Sur d’autres images, il se dévoile souriant avec son diplôme devant les drapeaux des Etats-Unis et du Tennessee ou devant un gâteau portant un message de félicitations pour son diplôme.
Discret, le jeune homme était apprécié de ses pairs. "Il était sympa, drôle, gentil", se souvient une ancienne camarade de classe, citée par le journal local Chattanooga Times Free Press. "Je n'aurais jamais pensé qu'il puisse faire ça". Fait troublant, Mohammod Youssuf Abdulazeez dit : "Mon nom déclenche des alertes à la sécurité nationale. Et le vôtre ?"
"Il travaillait dur". Du côté de l’ancien professeur de combat libre de Mohammod Youssuf Abdulazeez, les souvenirs sont tout aussi "normaux" voire élogieux envers l’auteur présumé de la double fusillade : "Il n'était jamais bruyant, jamais turbulent, ne sortait pas du rang, il travaillait dur et avait l'air d'apprécier l'entraînement. Il s'entendait avec tout le monde", a confié Scott Schrader à la chaîne CNN. C’était "le profil type du jeune Américain".
Pas de signes de radicalisation. D’après les propos de Dr. Sheikh, l’un des fondateurs de la mosquée et centre culturel que fréquentait régulièrement le jeune homme depuis deux ou trois mois pour la prière du vendredi, les Abdulazeez "étaient des gens très honnêtes", rapporte le New York Times. Il souligne également que le suspect "n'avait jamais montré de signes d’extrémisme".
Ne "pas laisser passer l'occasion de se soumettre à Allah". Toutefois, le site américain spécialisé SITE a retrouvé un blog que Mohammod Youssuf Abdulazeez semble avoir ouvert et sur lequel il n'a écrit que deux textes, datés du lundi 13 juillet, trois jours avant les faits. "La vie est courte et amère" et les musulmans ne devraient "pas laisser passer l'occasion de se soumettre à Allah" y écrit le jeune homme selon ce groupe qui surveille l'activité des mouvements islamistes sur internet. Dans l’un des deux textes, Mohammod Youssuf Abdulazeez parle également du sacrifice des Sahaba, les compagnons du Prophète, qui "ont fait le djihad au nom d'Allah".
Un voyage en Jordanie. L'homme, qui avait échappé à toute surveillance a pourtant voyagé en Jordanie, a indiqué une source proche du dossier, confirmant des informations parues dans la presse américaine. Il y a passé "près de sept mois l'an dernier", a expliqué le New York Times vendredi, citant un haut responsable anonyme du renseignement. Les enquêteurs épluchent les données des ordinateur, téléphone et comptes sur les réseaux sociaux pour tenter de savoir s'il a pu ou non être en contact avec des organisations terroristes durant son séjour dans le pays, poursuit le journal.