Guerre en Ukraine : ce qu'il faut retenir au 443e jour de l'invasion russe

Les forces de Kiev ont avancé de deux kilomètres autour de la ville de Bakhmout, épicentre des combats dans l'Est de l'Ukraine.
Les forces de Kiev ont avancé de deux kilomètres autour de la ville de Bakhmout, épicentre des combats dans l'Est de l'Ukraine. © VINCENZO CIRCOSTA / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP
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avec AFP / Crédit photo : VINCENZO CIRCOSTA / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP , modifié à
Au 443e jour de l'invasion russe, les forces de Kiev ont avancé de deux kilomètres autour de la ville de Bakhmout, épicentre des combats dans l'Est de l'Ukraine, a annoncé vendredi la vice-ministre ukrainienne de la Défense. L'armée russe a pour sa part affirmé avoir repoussé la veille 26 attaques ukrainiennes sur un front long de 95 kilomètres dans le secteur de Soledar.
L'ESSENTIEL

Kiev a dit vendredi avoir repris des territoires autour de la ville dévastée de Bakhmout, épicentre des combats avec la Russie, au moment où se profile une vaste offensive de Kiev, et la Chine a annoncé l'envoi d'un représentant spécial en Ukraine, Russie et d'autres pays européens. L'armée russe a pour sa part affirmé avoir repoussé la veille 26 attaques ukrainiennes sur un front long de 95 kilomètres dans le secteur de Soledar (Est) près de la ville-symbole de Bakhmout. Les attaques impliquaient "plus de 1.000 militaires et jusqu'à 40 chars", selon le ministère russe de la Défense.

A Kiev, la vice-ministre ukrainienne de la Défense, Ganna Malyar, avait auparavant assuré vendredi que "nos forces de défense ont progressé de deux kilomètres près de Bakhmout", ajoutant : "Nous n'avons perdu aucune position dans Bakhmout cette semaine".

Les principales informations à retenir :

  • Les forces ukrainiennes ont progressé de deux kilomètres près de Bakhmout, a annoncé le ministère de la Défense
  • La Chine a indiqué qu'elle enverra un représentant spécial en Ukraine, Russie et dans d'autres nations européennes afin d'y discuter d'un "règlement politique"
  • La Turquie confirme la conclusion proche d'un accord sur les céréales produites en Ukraine
  • Volodymyr Zelensky doit rencontrer samedi à Rome le président italien Sergio Mattarella
  • Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner a accusé vendredi les troupes régulières russes de "fuir" leurs positions près de Bakhmout en Ukraine
  • Le gouvernement belge a annoncé vendredi le déblocage d'une nouvelle enveloppe de près de 100 millions d'euros pour soutenir l'Ukraine et sa population
  • Vladimir Poutine et son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa ont exprimé, dans une conversation téléphonique, leur volonté d'"accentuer" leur coopération
  • Le fabricant allemand d'armement Rheinmetall va s'implanter en Ukraine en coopérant avec l'industrie militaire nationale pour réparer des véhicules militaires

La Russie nie l'avancée des forces ukrainiennes

Ces déclarations interviennent après qu'un autre haut responsable militaire ukrainien a déclaré mercredi que les forces russes avaient reculé de certaines zones proches de Bakhmout suite à des contre-attaques des forces de Kiev. Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, et des blogueurs militaires prorusses s'étaient alarmés du recul de troupes dans cette zone. Dans un entretien diffusé jeudi par la BBC, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait insisté sur le fait que Kiev avait encore besoin de temps et d'armes avant de lancer une contre-offensive d'ampleur très attendue. Evguéni Prigojine l'avait alors accusé d'être "malhonnête", affirmant que la contre-offensive ukrainienne "bat son plein".

Mais la Russie a nié jeudi soir toute percée de ses défenses par les forces ukrainiennes. "Les déclarations diffusées par des chaînes Telegram individuelles sur des 'percées des défenses' qui auraient eu lieu dans diverses parties de la ligne de contact ne correspondent pas à la réalité", a affirmé le ministère russe de la Défense dans un communiqué. Le ministère russe n'a cependant pas mentionné les informations faisant état d'un recul russe près de Bakhmout, se contentant d'indiquer que "des détachements d'assaut continuent de libérer la partie Ouest" de la ville où sont situées les dernières poches ukrainiennes. Le groupe paramilitaire russe Wagner, qui dirige l'assaut terrestre de Moscou contre Bakhmout, s'est récemment plaint de pénuries de munitions et a menacé de se retirer s'il ne reçoit davantage de soutien de Moscou.

L'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), basé aux États-Unis, a indiqué vendredi dans une analyse que Kiev avait "probablement percé certaines lignes russes lors de contre-attaques près de Bakhmout". La bataille pour Bakhmout (environ 70.000 habitants avant la guerre), ville dévastée et contrôlée à environ 80% par les forces russes, est la plus longue et la plus meurtrière depuis le début de l'invasion russe lancée en février 2022.

L'allemand Rheinmetall va réparer puis fabriquer des armes en Ukraine

Le fabricant allemand d'armement Rheinmetall va s'implanter en Ukraine en coopérant avec l'industrie militaire nationale pour réparer des véhicules militaires, première étape avant de fabriquer directement sur place, a-t-il annoncé vendredi. Une coentreprise va voir le jour entre le groupe allemand, l'un des fabricants des chars Leopard, et l'entreprise publique ukrainienne Ukroboronprom - un conglomérat militaire appartenant à l'État, a indiqué Rheinmetall dans un communiqué. "Dans une première étape conjointe avec Ukroboronprom, les activités dans le domaine de la réparation de véhicules militaires (...) doivent constituer la pierre angulaire de cette coopération", précise le communiqué.

"Dans les phases ultérieures, la coopération se concentrera sur la fabrication conjointe de certains produits Rheinmetall en Ukraine sur la base d'un transfert de technologie complet", ajoute le groupe qui envisage pour la suite que "de nouveaux systèmes militaires puissent également être développés conjointement" en Ukraine et exportés à l'étranger. La coentreprise devrait être opérationnelle à partir de la mi-juillet. Rheinmetall a pour souci "de couvrir les besoins urgents [de l'Ukraine] le plus rapidement possible", a déclaré Armin Papperger, PDG de Rheinmetall, cité dans le communiqué.

Armin Papperger avait déjà dit mener des discussions avec le gouvernement ukrainien en vue de l'implantation d'une usine dans le pays. Le gouvernement allemand est l'un des principaux contributeurs à l'aide militaire fournie par les alliés de l'Ukraine et livre notamment des armes et munitions fabriqués par Rheinmetall, comme les chars lourds Leopard récemment arrivés sur le champ de bataille face à la Russie. Le groupe de Düsseldorf (ouest) a réalisé des profits record en 2022 et intégré cette année l'élite de la Bourse de Francfort, l'indice Dax regroupant les 40 plus grosses entreprises allemandes.

Vladimir Poutine et le président sud-africain comptent "accentuer" leur coopération

Le président russe Vladimir Poutine et son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa ont exprimé vendredi, dans une conversation téléphonique, leur volonté d'"accentuer" leur coopération, selon le Kremlin, au moment où les Etats-Unis accusent Pretoria d'avoir fourni des armes à Moscou. Les deux dirigeants "ont exprimé leur volonté d'accentuer de nouveau les relations mutuellement bénéfiques dans divers domaines", a affirmé le Kremlin dans un communiqué qui ne mentionne pas les accusations de Washington. Selon Moscou, cette conversation téléphonique a eu lieu "à l'initiative de la partie sud-africaine".

Cet entretien téléphonique intervient en pleines tensions entre l'Afrique du Sud et les Etats-Unis, qui accusent Pretoria d'avoir livré des armes à la Russie, pays qui mène depuis plus d'un an une offensive militaire contre l'Ukraine. Après ces accusations, qui ont été faites par l'ambassadeur américain à Pretoria, le gouvernement sud-africain a promis de mener une enquête sur ces livraisons présumées. Lors de l'entretien téléphonique avec Cyril Ramaphosa, Vladimir Poutine s'est par ailleurs dit favorable à la "participation d'un groupe de dirigeants africains" à des discussions sur "les perspectives de résolution du conflit ukrainien", selon le Kremlin.

Les deux pays poursuivront également "une coordination étroite dans le cadre de la préparation des grands événements multilatéraux", dont le deuxième sommet Russie-Afrique prévu fin juillet à Saint-Pétersbourg en Russie et le sommet des pays des BRICS qui se tiendra en août à Johannesburg, en Afrique du Sud. Selon le Kremlin encore, Vladimir Poutine s'est une nouvelle fois dit être prêt à "fournir des volumes importants de céréales et d'engrais aux Etats africains dans le besoin, y compris à titre gratuit", alors que les exportations agricoles russes sont sanctionnées par les Occidentaux.

Nouvelle aide belge à l'Ukraine, grâce aux taxes sur les avoirs russes gelés

Le gouvernement belge a annoncé vendredi le déblocage d'une nouvelle enveloppe de près de 100 millions d'euros pour soutenir l'Ukraine et sa population, une aide piochée dans les revenus fiscaux engrangés sur les avoirs russes gelés en Belgique. La moitié des 92 millions alloués le sera sous la forme de véhicules blindés, armements, munitions, avec de premières livraisons prévues "très rapidement", a-t-il précisé dans un communiqué. L'autre moitié est destinée à la population civile, à l'aide humanitaire dispensée dans les grandes villes en coordination avec l'ONU, et à la "consolidation" de la présence diplomatique belge dans la région. La Belgique va ainsi ouvrir deux postes diplomatiques à Chisinau en Moldavie, et Erevan, capitale de l'Arménie.

La cheffe de la diplomatie Hadja Lahbib évoque notamment la nécessité d'"accompagner et protéger" les nombreux exilés ukrainiens en Moldavie, pays voisin. "Pour que la guerre finisse, il faut que la contre-offensive que planifie l'Ukraine soit un succès. L'aide supplémentaire que la Belgique apporte aujourd'hui y contribuera", souligne le Premier ministre Alexander De Croo. Depuis le déclenchement de l'invasion russe en février 2022, la Belgique a déjà fourni à l'Ukraine pour environ 300 millions d'euros d'aide militaire et civile, en comptant cette nouvelle enveloppe. Les taxes prélevées par l'Etat belge sur les intérêts produits par les avoirs financiers russes gelés dans le pays s'élèvent jusqu'à présent à 625 millions d'euros, a précisé à l'AFP le cabinet de Alexander De Croo. La Belgique compter piocher dans cette manne à la fois pour aider l'armée et la population en Ukraine, et pour financer l'accueil des réfugiés ukrainiens sur son sol.

Le patron de Wagner accuse l'armée russe de "fuir" près de Bakhmout

Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner a accusé vendredi les troupes régulières russes de "fuir" leurs positions près de Bakhmout en Ukraine, où Kiev a revendiqué une percée, estimant que les défenses "s'effondrent". "Il y a eu tout simplement une fuite des unités du ministère de la Défense sur les flancs" à Bakhmout, qui sont tenus depuis peu par des unités régulières de l'armée russe, a affirmé Evguéni Prigojine dans une vidéo diffusée par son service de presse sur Telegram. Selon lui, les forces ukrainiennes ont repris le contrôle d'un réservoir au nord de cette ville à l'épicentre des combats dans l'est de l'Ukraine et pris position sur des hauteurs tactiques donnant sur elle. Il a également affirmé que les soldats de Kiev avaient récupéré la route allant vers Tchassiv Iar, plus à l'ouest, qui était bloquée par les militaires russes depuis plusieurs semaines.

Le ministère russe a néanmoins fait état vendredi d'un redéploiement d'unités au nord de Bakhmout, dans la zone du "réservoir de Berkhivske", pour "renforcer la durabilité de la défense", une déclaration interprétée par des observateurs comme un aveu de recul. "Les tentatives du ministère de la Défense dans le champ informationnel d'édulcorer la situation mènent et mèneront à une tragédie globale pour la Russie", a lâché Evguéni Prigojine vendredi. "Il faut immédiatement arrêter de mentir", a-t-il lancé.

Selon lui, d'autres avancées de l'armée ukrainienne dans cette direction permettraient à celle-ci d'encercler les hommes de Wagner dans Bakhmout, qui est actuellement à plus de 90% aux mains des Russes. "La prise de Bakhmout n'apportera rien à la Russie car les flancs sont en train de s'effriter et le front en train de s'effondrer", s'est encore alarmé Evguéni Prigojine. Le patron de Wagner, en conflit ouvert avec la hiérarchie militaire russe, a une nouvelle fois assuré ne pas recevoir assez de munitions pour ses hommes, tandis qu'il ne reste selon lui plus qu'une vingtaine d'immeubles sous contrôle ukrainien à l'intérieur de Bakhmout.

Volodymyr Zelensky rencontrera samedi à Rome le président italien

Sur le front diplomatique, Volodymyr Zelensky doit rencontrer samedi à Rome le président italien Sergio Mattarella, a indiqué à l'AFP un porte-parole de la présidence italienne. "Nous confirmons que cette rencontre aura lieu demain", a-t-il déclaré, interrogé sur des informations concernant une réunion entre les deux présidents. Une rencontre du président ukrainien avec le pape François est également "possible", selon une source du Vatican. Il s'agira de la première visite de Volodymyr Zelensky en Italie, membre de l'Union européenne et de l'OTAN, depuis l'invasion russe en février 2022. Les détails de sa visite, notamment les horaires des rencontres, n'ont pas été rendus publics pour des raisons de sécurité.

Le pape, âgé de 86 ans, qui a déjà accueilli le président ukrainien au Vatican en février 2020, a appelé à de très nombreuses reprises à la paix en Ukraine et prie pour ses victimes presque chaque semaine lors de son audience générale. Le mois dernier, il a rencontré le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal, qui l'a invité en Ukraine et lui a demandé son aide pour le retour des enfants emmenés de force en Russie.

Le président ukrainien devrait également rencontrer la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni qui s'était rendue en février à Kiev. "J'ai voulu (venir à Kiev) pour réitérer le soutien total de l'Italie à l'Ukraine face à l'agression russe, et réaffirmer que l'Italie n'a pas l'intention de faiblir", avait alors déclaré Mme Meloni durant une conférence de presse avec Volodymyr Zelensky. Evoquant de possibles livraisons d'armes supplémentaires à Kiev, elle a indiqué que Rome était "concentrée sur les systèmes de défense anti-aérienne", déjà promis en coopération avec la France, mais que l'envoi d'avions était "une décision à prendre avec les partenaires internationaux".

Le représentant spécial de la Chine va se rendre en Ukraine

La Chine a indiqué vendredi qu'elle enverra à partir de lundi un représentant spécial en Ukraine, Russie et dans d'autres nations européennes afin d'y discuter d'un "règlement politique" de la guerre en Ukraine. Si le géant asiatique appelle régulièrement au respect de la souveraineté des Etats, il n'a jamais condamné publiquement le président russe Vladimir Poutine pour son invasion du territoire ukrainien.

Pékin se présente comme partie neutre dans le conflit et entend jouer un rôle de médiateur, même si sa position de proche partenaire économique et diplomatique de Moscou le disqualifie aux yeux de certaines capitales européennes. "A partir du 15 mai, l'ambassadeur Li Hui, représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires eurasiatiques, se rendra en Ukraine, Pologne, France, Allemagne et Russie", a indiqué Wang Wenbin, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. "Il s'entretiendra avec chacune de ces parties d'un règlement politique de la crise ukrainienne", a-t-il souligné devant la presse.

Prolongation de l'accord sur les céréales ukrainiennes

La prolongation de l'accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes est proche d'être conclue, a affirmé le ministre turc de la Défense Hulusi Akar selon un communiqué transmis vendredi par son ministère. "On se dirige vers la conclusion de la prolongation de l'accord sur les céréales", a affirmé Hulusi Akar lors d'un discours jeudi rendu public vendredi.

La Turquie est parvenue depuis le début du conflit à maintenir des relations avec l'Ukraine et la Russie. Ankara a été l'un des acteurs clés de la conclusion de l'accord dit de la mer Noire, signé le 22 juillet dernier pour 120 jours par l'ONU, l'Ukraine, la Russie et la Turquie. L'accord a permis de soulager la crise alimentaire mondiale provoquée par la guerre et a été reconduit pour quatre mois. Il arrive à expiration le 18 mai et la Russie n'a pas donné son aval à un troisième renouvellement.

Les États-Unis et le Royaume-Uni avaient appelé conjointement mardi à la prolongation de l'accord, dénonçant le fait que la Russie continue d'user de la nourriture "comme d'une arme". La Russie dénonce la non application d'un deuxième accord avec l'Ukraine pour permettre ses propres exportations de céréales et d'engrais. Moscou se plaint de ne pas pouvoir vendre sa production et ses engrais en raison des sanctions occidentales touchant notamment les secteurs financiers et logistiques. L'Ukraine est l'un des principaux producteurs de céréales au monde.