Selon un article du "Wall Street Journal", l'armée israélienne réfléchirait à déverser d'importantes quantités d'eau dans les tunnels où trouvent refuge les membres du Hamas, dans les sous-sols de la bande de Gaza. Bien que fastidieux, le plan paraît envisageable sur le plan technique, mais son efficacité est incertaine.
Dans sa lutte sans merci contre le Hamas , l'armée israélienne songerait à une nouvelle stratégie qui consisterait à prendre le mouvement terroriste à son propre piège. Selon le Wall Street Journal , Tsahal aurait mis au point un vaste système de pompage d'eau de mer, près du camp de réfugiés d’Al-Chati, sur le littoral de l'enclave palestinienne. L'objectif serait alors de déverser cette eau dans les fameux tunnels , utilisés comme cachette par les terroristes du Hamas, afin d'inonder ce vaste réseau et d'en chasser leurs occupants.
Les tunnels du Hamas, un "vaste gruyère"
Le système mis au point permettrait, selon le quotidien américain, de déplacer des milliers de mètres cubes d’eau par heure et noierait les souterrains gazaouis "en quelques semaines". Néanmoins, plusieurs experts décrivent une réalité plus nuancée. D'abord en raison de la configuration de ces tunnels. "Cela se présente comme un vaste gruyère", rappelle le général Jérôme Pellistrandi rédacteur en chef de la revue Défense nationale. Ces galeries souterraines n'étant pas reliées, comme peuvent l'être les égouts de Paris, cette stratégie ne permettra pas de détruire l'ensemble des tunnels, estime pour sa part le général Dominique Trinquand.
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"Par ailleurs, il y a toujours la question des otages qui peuvent se trouver à l'intérieur des tunnels. Et il est trop difficile pour l'armée israélienne de vérifier qui s'y trouve", ajoute l'ancien chef de la mission militaire française à l'ONU. Une telle stratégie demanderait également un temps considérable, en raison de la quantité d'eau nécessaire pour la mener à son terme. "On considère qu'il y a entre 500 et 800 km de tunnels. Donc, il y a le risque que ce soit un puits sans fond", fait remarquer Jérôme Pellistrandi.
Un sous-sol très pollué
Déloger les terroristes du Hamas de la sorte pourrait aussi provoquer d'importances conséquences environnementales. "Nous sommes dans une zone qui est ultra-polluée. Or cette eau finira bien par s'infiltrer et sortir, à un moment donné. Et, comme les sous-sols sont pollués par l'activité humaine et la surpopulation, l'eau transportera avec elles des saletés un peu partout, ce qui risque d'aggraver cette pollution", soulève Jérôme Pellistrandi. Les quelques rivières que compte la bande de Gaza, alimentées par les sous-sols, risqueraient alors de contenir "des métaux lourds, voire du fioul", alerte l'ancien militaire.
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Cette stratégie militaire avait déjà été adoptée par l'Égypte en 2016. Il s'agissait alors d'inonder des tunnels reliant la bande de Gaza au territoire égyptien. Le Caire accusait des activistes palestiniens d'utiliser ces galeries pour fournir des armes à des mouvements djihadistes actifs dans le Sinaï. "On n'a pas eu un retour d'expérience très précis", relève Jérôme Pellistrandi. Interrogé après la parution de l'article du Wall Street Journal, Richard Hecht, lieutenant-colonel de l'armée israélienne, n'a pas confirmé l'élaboration d'un tel plan... sans pour autant démentir. "Nous utilisons tout ce dont nous disposons pour nous attaquer aux systèmes de tunnels. C’est tout ce que je peux dire à ce stade".