Israël-Hamas : «On est en présence dans ce conflit, d'une inversion des réalités», juge Georges Bensoussan

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Yanis Darras , modifié à

L'historien Georges Bensoussan était l'invité de La Grande interview d'Europe 1-CNews ce jeudi. Au micro de Sonia Mabrouk, l'auteur de "les origines du conflit israélo-arabe" est revenu sur l'opération militaire d'Israël contre l'hôpital d'al-Chifa et sur les propos de Dominique de Villepin, qu'il juge "ineptes".

L'armée israélienne continue sa progression dans la bande de Gaza. Tsahal organise depuis ce mercredi une opération "ciblée" contre l'hôpital d'al-Chifa , le plus grand hôpital de Gaza. Une manœuvre militaire largement critiquée à l'internationale, notamment par les États-Unis, qui démentent avoir donné leur feu vert pour réaliser cette opération. 

Malgré tout, Israël a publié rapidement des photos et des vidéos d'armes et d'uniformes du Hamas provenant de l'hôpital d'al-Chifa. "L'ONU, en 2009, avait déjà dénoncé que l'hôpital al-Chifa servait à cacher des armes, notamment sous les salles d'opération et sous les salles de pédiatrie. Mahmoud Abbas avait dit la même chose en 2014", rappelle, au micro d'Europe 1, l'historien Georges Bensoussan. 

Ne pas reproduire les erreurs des États-Unis

Depuis longtemps, c'est un secret de polichinelle en Israël, mais comme dans tous les états-majors, que l'hôpital Al-Chifa, c'est le centre de commandement" du Hamas, poursuit-il. "La vraie question pour Israël était la suivante : faut-il ou non s'attaquer au centre de commandement du Hamas alors qu'il est situé sous un hôpital ?", s'interroge l'auteur de l'ouvrage "Les origines du conflit israélo-arabe". 

Pour ce dernier, "l'armée israélienne a pris l'hôpital sans donner l'assaut. Elle n'a pas détruit. Souvenez-vous de l'hôpital de Mossoul, quand les Américains l'ont pris, ils ont rasé, littéralement", ajoute Georges Bensoussan. "On peut y lire, on a vu les images, ils n'ont rien détruit, ils sont entrés par le service des urgences, puis ils ont gagné les souterrains", poursuit-il, estimant que Tsahal prenait des précautions dans le cadre de cette opération. 

Mais pour l'historien, "on est en présence, dans ce conflit, d'une inversion des réalités, d'un retournement de l'agresseur en agressé qui stupéfie et qui, je crois, stupéfiera les historiens dans 20 ans". Preuve en est, l'ancien ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin exhorte Israël à ne pas répéter les erreurs du passé et en particulier les erreurs des États-Unis qui, "en luttant contre le terrorisme, a fini par nourrir la bête immonde du terrorisme", juge-t-il.

Les propos de Dominique de Villepin jugés "ineptes"

"Effectivement, réagir comme les États-Unis, c'est nourrir la haine, nourrir le ressentiment, nourrir et les élever les nouvelles générations de terroristes", estime Georges Bensoussan. Mais l'État hébreu n'applique pas la même stratégie que les États-Unis, poursuit-il. "Ils ne détruisent pas tout systématiquement sur leur passage. Ils avancent lentement, progressivement", jauge-t-il, car "ils sont conscients qu'il faut préparer l'avenir. Un jour ou l'autre, il faudra vivre avec ces populations". 

Mais Dominique de Villepin reproche à l'État hébreu de n'avoir qu'une stratégie militaire derrière la contre-attaque du pays, sans anticiper l'avenir. "Si Israël n'avait eu qu'une stratégie militaire, ils auraient détruit Gaza city en 48 heures. Donc, les propos de Villepin sont ineptes", conclut Georges Bensoussan.