Kiev presse ses alliés d'établir un bouclier aérien sur l'Ouest de l'Ukraine

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Kiev n'attend par contre pas d'avancée dans la perspective d'une adhésion à l'Alliance. © Anatolii STEPANOV / AFP
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avec AFP , modifié à
L'Ukraine a demandé aux alliés européens de créer une zone aérienne protégée, à cause des multiples attaques russes. Leur but est de créer une zone où il sera possible de protéger les civils, les infrastructures énergétiques et les industries. 

Faute d'obtenir des moyens antiaériens suffisants pour se protéger du déluge de feu russe, l'Ukraine presse ses alliés européens d'établir une zone d'exclusion aérienne dans l'ouest de son territoire via des systèmes de défense déployés en Pologne et en Roumanie voisines, pour créer un sanctuaire où industries, infrastructures énergétiques et populations civiles seraient protégés.

"Je ne comprends pas pourquoi l'OTAN ne déploie pas des batteries de Patriot (système de défense antiaérienne, ndr) le long de la frontière polonaise. Après tout, des missiles russes sont déjà entrés dans les espaces aériens polonais et roumain. Cela protégerait les frontières de la Pologne et de la Roumanie et cela créerait une zone sûre dans l'Ouest et le Sud de l'Ukraine", plaide le député Oleksiï Gontcharenko (indépendant).

Livraison de missiles antiaériens 

Une demande relayée par plusieurs responsables civils et militaires ukrainiens rencontrés par l'AFP à Kiev, dans le cadre d'un déplacement organisé par l'Institut français de relations internationales (IFRI) et le think tank ukrainien New Europe Center. Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba avait ouvert le débat fin mai en assurant qu'il n'existait "aucun argument légal, sécuritaire ou moral qui empêcherait nos partenaires d'abattre les missiles russes au-dessus du territoire de l'Ukraine à partir de leur territoire", mais sans préciser les modalités de ce scénario.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'a de cesse, depuis plusieurs mois, de demander des systèmes supplémentaires de protection du ciel à ses partenaires occidentaux, mais ceux-ci n'arrivent qu'au compte-gouttes. Dernières victoires en date pour Kiev: la Roumanie vient de lui promettre l'envoi d'un système Patriot, et les Etats-Unis ont décidé de livrer en priorité l'Ukraine en missiles antiaériens pendant seize mois pour permettre au pays de reconstituer ses stocks. Mais le temps presse pour le pays, dont la moitié des capacités de production électrique nationales ont été détruites ces derniers mois. Chaque semaine, missiles et drones russes s'abattent sur son réseau énergétique, provoquant des coupures de courant quotidiennes qui affectent la quasi-totalité de la population.

Situation énergétique critique

Après avoir pilonné pendant des mois les réseaux de distribution énergétiques ukrainiens à partir d'octobre 2022, la Russie s'attache désormais à détruire les installations de production, bien plus coûteuses et dont la réparation demande des années. Moscou vise aussi les réserves énergétiques du pays. "Dans l'ouest de l’Ukraine, la Russie a tapé un stockage de gaz souterrain, enterré à 3 km de profondeur", souligne une source diplomatique européenne.

"Dans le secteur énergétique, la situation est extrêmement difficile", s'inquiète un haut responsable sécuritaire ukrainien, craignant qu'elle ne se détériore encore à l'approche de l'hiver. "Des pourparlers sont en cours" avec les alliés occidentaux au sujet de cette "no fly zone" au-dessus de l'ouest de l'Ukraine mais "ce n'est pas une décision simple à prendre", explique le responsable. Les pays occidentaux sont soucieux de ne pas s'engager frontalement contre la Russie, ce qui "rend le processus lent et silencieux", relève-t-il. 

Le sujet pourrait être abordé lors duprochain sommet de l'OTAN à Washington début juillet, selon la vice-Première ministre ukrainienne Olga Stefanichyna. "Nous faisons tout ce que nous pouvons pour mobiliser suffisamment de défenses antiaériennes pour permettre au pays de continuer à fonctionner tout au long de cette guerre", a-t-elle fait valoir. 

Kiev n'attend par contre pas d'avancée dans la perspective d'une adhésion à l'Alliance. "Les chances pour nous d'obtenir (lors de ce sommet) une invitation à joindre l'OTAN sont proches de zéro", Washington et Berlin y étant opposés, déplore une source diplomatique ukrainienne, qui ne désespère pas pour autant d'obtenir des concessions sur d'autres sujets. "Le sentiment de culpabilité met la pression sur les alliés pour prendre des décisions alternatives fortes" en faveur de Kiev, estime la source.