La mort d’un Afro-Américain, abattu par la police, révolte les Américains

Confrontées à des réactions indignées émanant des quatre coins des Etats-Unis, les autorités américaines ont fini par lancer mercredi une enquête fédérale sur cet homicide.
Confrontées à des réactions indignées émanant des quatre coins des Etats-Unis, les autorités américaines ont fini par lancer mercredi une enquête fédérale sur cet homicide. © MARK WALLHEISER / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP
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avec agences
Alton Sterling, vendeur de CD sur le parking d'un magasin en Louisiane a été tué mardi soir.

C’est la nouvelle affaire qui scandalise l’Amérique. Un homme, afro-américain, a été abattu mardi à Baton Rouge, en Louisiane, par la police. Une enquête fédérale a été lancée. Le spectre d’un acte raciste a aussitôt émergé parmi les nombreuses personnes qui se sont rassemblées pour dénoncer les brutalités policières.    

Que s’est-il passé sur le parking du centre commercial de Baton Rouge ?

Mardi, deux policiers se rendent sur le parking d’un supermarché de la ville de Baton Rouge, capitale de la Louisiane. La police a reçu, quelques instants plus tôt, un appel anonyme d’une personne affirmant qu’elle a été menacée par un homme avec un pistolet.

Lorsque les deux agents arrivent sur place, ils somment Alton Sterling, qui vend des CD sur le parking du magasin, de se coucher au sol. Mais l’homme refuse. D’après une vidéo de l’altercation, une personne a alors crié aux policiers : "Il est armé !". Les deux policiers dégainent alors leur arme et plusieurs détonations retentissent, avec un intervalle. L’homme est touché à bout portant.

Sur une seconde vidéo apparue plus tard, filmée sous un autre angle, Alton Sterling est vu saignant abondamment du thorax. Un des deux policiers a alors retiré de la poche de son short ce qui pourrait être une arme.

Qui était Alton Sterling ?

Ce père de cinq enfants, âgé de 37 ans, vendait des CD sur le parking d’un centre commercial de Baton Rouge, avec l’accord du gérant des lieux. Avec le temps, il avait été baptisé "CD man" par les clients du magasin.

"Alton était quelqu’un de très respecté et d’aimé dans la communauté", a déclaré son avocat à la chaîne américaine CNN. "Il ne méritait pas cela. Il essayait de gagner sa vie, légalement. Il n’a jamais été impliqué dans quelque affaire judiciaire".

L'un des enfants d'Alton Sterling, Cameron, 15 ans, a éclaté en sanglots tandis que sa mère, Quinyetta McMillon parlait au micro. "Nous poursuivrons jusqu'à ce que justice soit faite", a-t-elle lancé. "J'appelle quiconque avec assez de courage dans cette ville à aller arrêter ces deux agents. Si le système est le même pour tous, il doit l'être aussi pour eux". Les deux policiers font l'objet d'une suspension administrative, conformément à "la procédure en vigueur", a précisé la police de Baton Rouge.

Que disent les témoins qui ont assisté à la scène ?

Selon Abdullah Muflahi, le gérant du magasin, les policiers ont jeté Alton Sterling sur sa voiture. "Ils lui ont dit de ne pas bouger. Lui, leur demandait ce qu’il avait fait de mal", a-t-il expliqué sur CNN. Selon le propriétaire du magasin les officiers de police ont utilisé un Taser au moins une fois sur le vendeur de CD.

Pourquoi une enquête a-t-elle été ouverte ?

Confrontées à des réactions indignées émanant des quatre coins des Etats-Unis, les autorités américaines ont fini par lancer mercredi une enquête fédérale sur cet homicide. Selon le journal local The Advocate, des dizaines de personnes se sont rassemblées mercredi soir à Baton Rouge, pour allumer des bougies sur les lieux de la mort d'Alton Sterling.

"Le principal organe chargé de l'enquête sera la division des droits civiques du ministère de la Justice, assistée du bureau du procureur de la Louisiane et du FBI", a annoncé aux médias John Bel Edwards, le gouverneur de cet Etat méridional. Se disant "profondément préoccupé", il a appelé au calme alors que plusieurs métropoles américaines, comme Baltimore et Ferguson, ont été le théâtre d'émeutes après de tels drames.  La Maison-Blanche a d'ailleurs proposé son aide, a indiqué Kip Holden, le maire de Baton Rouge.               

Pourquoi l’affaire a-t-elle pris une telle ampleur et si rapidement ?

Ce n’est pas la première fois que les Etats-Unis font face à des violences policières contre des afro-américains. Ce n’est pas non plus la première fois que des manifestations sont organisées pour dénoncer ces pratiques. Et dans un contexte d’élection présidentielle, le sujet – très sensible – s’est aussitôt invité dans la campagne. La candidate démocrate à la Maison-Blanche, Hillary Clinton, a regretté une "tragédie", dans un communiqué. "Il y a un vrai problème lorsque tant d'Américains ont des raisons de croire que notre pays ne considère pas qu'ils ont autant de valeur que d'autres à cause de la couleur de leur peau", a-t-elle ajouté.

A la différence de nombreuses affaires semblables qui ont embrasé le pays ces dernières années, l'enquête fédérale "marque une réponse inhabituellement rapide du ministère américain de la Justice", a fait remarquer Phil Stinson, un expert en droit pénal. "Normalement, une enquête locale se déroule d'abord. (Mais) désormais, tout le monde s'intéresse à ces tirs (policiers). Il y a encore cinq ans, cela n'attirait l'attention de personne", a-t-il souligné. 

 

Un autre afro-américain tué à Minneapolis

Mercredi, une nouvelle affaire d'afro-américain tué par la police a émergé. Un policier de la banlieue de Minneapolis a mortellement blessé par balle un homme au cours d'un contrôle routier. Le conducteur a été blessé par un agent lors d'un contrôle routier effectué à Falcon Heights dans le Minnesota, mercredi à 21h00 locales. Il est décédé après son transfert à l'hôpital, a précisé la police. 

"Il cherchait sa carte d'identité et son portefeuille dans sa poche", a déclaré la petite amie de la victime, qui se trouvait elle aussi à bord du véhicule contrôlé. "Il a dit à l'agent qu'il avait une arme à feu et qu'il cherchait son portefeuille, et l'agent a ouvert le feu et l'a blessé au bras".