L'accord sur la trêve en Syrie en cinq questions

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Une première trêve de 48 heures a commencé lundi soir en Syrie © AFP
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Margaux Lannuzel avec AFP
Russes et Américains, respectivement parrains du régime Syrien et de l'opposition, ont conclu un nouvel accord pour la mise en place d'une trêve dans le pays, samedi matin.

 

"Un retour au processus politique". Tel est l'objectif de l'accord conclu samedi matin, sur une nouvelle trêve des combats en Syrie, selon Sergueï Lavrov. Après une journée marathon de négociations à Genève, le ministre des Affaires étrangères russe et son homologue américain, John Kerry, ont convenu d'un nouveau plan après cinq années d'échec des négociations. S'il fonctionne, celui-ci pourrait mener vers une collaboration militaire inédite entre les deux pays.

  • Que prévoit l'accord ?

Une trêve initiale de 48 heures a commencé lundi, à 19 heures locales. Le régime et l'opposition doivent "cesser toutes les attaques, y compris les bombardements aériens" et éviter "toute tentative d'avancée territoriale aux dépens de l'autre partie", selon John Kerry. Si elle n'est pas violée, cette période d'arrêt des combats pourrait être renouvelée pour deux jours.

Sur le plan humanitaire, les organisations qui viennent en aide aux civils doivent bénéficier d'un accès "sans entrave et durable à toutes les régions assiégées ou difficiles d'accès, y compris d'Alep", selon les termes de l'accord. La route du Castello, ancien axe de ravitaillement approvisionnant 250.000 personnes, aujourd'hui contrôlée par le régime, doit notamment être démilitarisée.

  • Quelles sont ses faiblesses ?

Si l'accord a été accepté par le régime syrien et ses alliés, l'opposition n'a toujours pas donné son feu vert lundi, à quelques heures de l'entrée en vigueur de la trêve. "Nous voulons savoir quelles sont les garanties", a expliqué Salem al-Mouslet, porte-parole de l'opposition syrienne au Haut comité des négociations (HCN). "Quelle est la définition choisie pour le 'terrorisme' et quelle sera la réponse en cas de violations ?", s'est-il notamment interrogé, soulignant que le régime syrien employait ce terme pour désigner tous les groupes ayant pris les armes contre lui, qu'ils soient modérés, islamistes ou djihadistes.

De son côté, le chef en second d'un groupe rebelle islamiste, Ahrar al-Cham, a d'ores et déjà exprimé son scepticisme face à cet accord, arguant que "le peuple ne peut pas accepter des demi-solutions". Puissant sur le terrain, Ahrar al-Cham combat notamment aux côtés des djihadistes de  Fateh al-Cham, considérés comme "terroristes" par Washington et Moscou, au même titre que l'organisation Etat islamique (EI). Or, le plan présenté samedi ne clarifie pas si la trêve concerne ou non les régions où les rebelles sont alliés à ces djihadistes.

  • Sera-t-il respecté ?

Rien n'est moins sûr. Comme lors d'un précédent accord, les Etats-Unis et la Russie se chargeront d'évaluer les violations rapportées des belligérants. Mais pour l'opposition, seule Moscou, alliée de Damas, est en mesure de forcer le régime syrien à respecter la trêve : "Nous ne nous attendons pas à ce que le régime le fasse de plein gré", a affirmé Bassma Kodmani, membre du Haut comité des négociations. Malgré son accord au plan de samedi, le pouvoir syrien ne semble pas tellement plus optimiste. "Il y a ceux qui se font des illusions, et cela fait cinq ans qu'ils ne sont pas débarrassés de ces illusions", a affirmé le président Bachar el-Assad. "Certains pariaient sur des promesses de l'étranger", a-t-il poursuivi dans une référence claire aux "parrains" des négociations. Et d'assurer que ces promesses "ne se concrétiseront pas".   

Les Etats-Unis et la Russie, eux, se projettent déjà au-delà des 48 heures de la première trêve. Si le silence des armes tient une semaine, les deux pays ont annoncé qu'ils "travailleront ensemble pour mener des frappes militaires" et vaincre les groupes islamistes EI et Fateh al-Cham. Des frappes coordonnées seraient menées par les avions russes et américains dans certaines zones, tandis que l'armée de l'air syrienne frapperait dans d'autres, a avancé Sergueï Lavrov.

  • Pourquoi est-il important ?

Cet accord de cessez-le-feu doit, une nouvelle fois, arrêter l'effusion de sang qui dure depuis cinq ans et permettre la livraison d'une aide humanitaire cruciale à des centaines de milliers de civils. Toutes les trêves décidées depuis le début du conflit ont échoué, y compris un premier accord russo-américain de "cessation des hostilités", entré en vigueur en février et abandonné après de multiples violations. Les discussions indirectes entre Damas et l'opposition syrienne avaient été interrompues fin avril.

Ce nouvel accord représente donc un espoir, d'autant qu'il pourrait déboucher sur une coopération militaire inédite contre les djihadistes.

  • Peut-il mener vers la  paix ?

Si c'est le cas, ce sera seulement à long terme. Après une "période de recul de la violence (...) nous faciliterons une transition politique, qui est le seul moyen de parvenir à une fin durable de cette guerre", a affirmé John Kerry, samedi.  De son côté, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhail Bogdanov, a indiqué qu'une nouvelle séance de discussions entre le gouvernement syrien et l'opposition pourrait avoir lieu début octobre.