En Iran, se marier coûte cher. Minimum 10 000 euros, quand le salaire moyen brut n’excède pas les 330 euros. Le gouvernement iranien alloue donc aux jeunes couples un crédit mariage à taux bonifié, par le biais des banques publiques : 100 millions de rials iraniens (soient 2.820 euros), pour aider les fiancés à organiser leur union.
Problème : les jeunes peinent à gagner assez d’argent pour se payer un logement et une cérémonie. Plus de 12% de la population est au chômage, et l’inflation est constante. Les jeunes Iraniens se marient donc de plus en plus tardivement : 28 ans pour les hommes, soit huit ans plus tard qu’en 1979, et 23 ans et demi pour les femmes, contre 18 ans pendant la Révolution islamique.
Et en pleine campagne présidentielle, la diminution du nombre de mariages est devenue un sujet de division récurrent entre les six candidats.
Le président sortant attaqué sur le "crédit mariage". Le montant du "crédit mariage" a ainsi focalisé une bonne partie du premier débat télévisé de la présidentielle iranienne, consacré aux questions sociales.
Selon le site d’information Le Muslim Post, le président sortant Hassan Rohani a défendu son bilan, en rappelant qu’il avait fait passer le "prêt de l’amour" de 30 millions de rials (846 euros) à 100 millions (2.800 euros).
Son rival, le religieux conservateur Ebrahim Raïssi, lui a rétorqué que "500 000 personnes attendent actuellement sur une liste d’attente" pour recevoir leur argent. Il a promis de faciliter l’accès au prêt, dont dépendent selon lui "l’espérance et le bonheur de la jeunesse".
Début du premier débat télévisé en #Iran. Présidentielle 2017. pic.twitter.com/NPzG1YmPhQ
— Ahmad PARHIZI (@APARHIZI) 28 avril 2017
Hassan Rohani est fragilisé par la situation économique du pays, qu'il peine à redresser. Sa gestion a même été critiquée par le guide suprême religieux Ali Khamenei, à l'occasion de Norouz, le nouvel an iranien. En l'attaquant sur la baisse des mariages, ses adversaires en profitent pour pointer la dégradation du pouvoir d'achat des Iraniens, qui rend les mariages coûteux difficiles d'accès.
Le "crédit mariage" faisait déjà partie des promesses électorales de Mahmoud Ahmadinejad en 2005. Arrivé au pouvoir, il avait à l’origine fixé le montant du prêt à 40 millions de rials iraniens, (3.345 euros à l’époque).
Préserver la morale islamique. En Iran, le mariage des jeunes est un double enjeu. Premièrement, le gouvernement tient à faire respecter la morale islamique, qui interdit tout contact physique avant le mariage. Il n’y a pas de relation amoureuse possible hors mariage. La cohabitation entre un homme et une femme non mariés est considérée comme "une union mortelle et immorale" par la loi.
Relancer la natalité. Encourager les mariages des jeunes est aussi un enjeu démographique pour le pays, qui voit ses naissances diminuer. Le taux de fécondité iranien est actuellement d’1,7. C’était plus de deux fois plus en 1995, avec quatre enfants par femme.
Preuve que le sujet préoccupe les élites politiques et religieuses, en 2015, les ayatollahs avaient lancé un site de rencontre pour encourager les mariages. Sur "Trouver son égal", une centaine d’entremetteurs, religieux, médecins et enseignants, aident ainsi les volontaires à trouver le conjoint idéal. Objectif : conclure 100 000 mariages par an, et doubler la population iranienne d’ici 50 ans.
Pourquoi se marier en Iran coûte-t-il si cher ?
La plupart des mariages iraniens coûtent au moins 10.000 euros, généralement payés par la famille du marié. La fête peut durer plusieurs jours, avec une multitude de cadeaux, également offerts en amont du mariage. La cérémonie s'inspire des traditions venues du zoroastrisme et de l'islam. L'acte de mariage fixe également une dot prénuptiale appelée "méhrieh". Le mari devra la verser à sa femme en cas de divorce. Cette dot est calculée en pièces d'or. Cents pièces d'or valent environ 20.000 euros.