Un "calvaire" pour les uns, un "cauchemar" pour les autres : les qualificatifs ne manquaient pas jeudi dans la presse britannique pour évoquer le discours raté de la Première ministre en clôture du congrès du Parti conservateur mercredi soir, à Manchester. L’allocution de Theresa May a en effet viré au cauchemar, de sa longue quinte de toux à l’intervention d’un humoriste, reléguant par là même le fond de son discours au second plan. Censée relancer le "rêve britannique" alors que les Tories ont perdu leur majorité aux dernières législatives et que le pays fait face au Brexit, la cheffe du gouvernement est apparue au contraire encore plus fragilisée.
Séquence 1 : un humoriste lui tend une lettre de licenciement
Alors qu’elle appelle ses troupes à rester unies face au Brexit, Theresa May se voit proposer une lettre de licenciement par un humoriste. Simon Brodkin parvient jusqu’à la tribune pour lui tendre cette feuille en précisant : "Boris m’a demandé de vous donner ça", dit-il en référence à Boris Johson, secrétaire d’État aux Affaires étrangères et rival de la Première ministre qui ne cache pas ses ambitions de prendre un jour sa place. Sans pour autant interrompre son discours, Theresa May saisit la fausse lettre et la dépose aussitôt par terre. L’humoriste est quant à lui sorti de la salle par le service de sécurité, appuyé par les "Get out" des militants surchauffés dans la salle.
"Boris [Johnson] m'a demandé de vous le transmettre" : Theresa May reçoit un formulaire de licenciement en plein discours #AFPpic.twitter.com/VUAgcN7kBA
— Agence France-Presse (@afpfr) 4 octobre 2017
Séquence 2 : une violente quinte de toux l’oblige à prendre une pastille
Ni les verres d’eau ni la pastille n’y auront changé quelque chose : Theresa May a été prise d’une longue quinte de toux lors de son discours. Alors qu’elle parle du déficit public, la Première ministre commence à avoir la voix éraillée, puis se met à tousser de façon répétée. Elle prend d’abord un verre d’eau, dont elle en reverse une partie sur son pupitre. Ensuite, le ministre des Finances lui donne une pastille pour la gorge. Même la salle se met à l’applaudir comme pour donner un peu de répit à Theresa May lors de ce moment gênant. Obligée de s’excuser, la Première ministre joue la carte de l’humour : "j’espère que vous remarquerez que le Chancelier (ministre des Finances, ndlr) me donne quelque chose gratuitement… Mais on n’a rien sans rien, le Chancelier me dira probablement dans une minute qu’il y a un prix à payer" pour cette pastille, ironise-t-elle.
Puis Theresa May s’étranglait dans son discours entre deux quintes de toux...
— BRΞIZH is ñ (@BreizhOfficiel) 4 octobre 2017
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En toussant, Theresa May a dévoilé à son poignée un bracelet à l’effigie de Frida Kahlo, célèbre peintre mexicaine et figure de l’activisme communiste. Un choix de tenue "tourné en ridicule" pour le Times.
Séquence 3 : le décor tombe en morceaux
Comble du congrès : plusieurs lettres du slogan des Tories "Construire un pays qui fonctionne pour chacun", affichées sur le mur derrière le pupitre de Theresa May, tombent alors que la Première ministre s’exprime. Certains y verront une métaphore du parti lui-même qui tombe en lambeaux.
Pauvre @theresa_may, si même les lettres ne tiennent plus .. pic.twitter.com/bgLNn4iiFE
— Goudeau Clément (@ClementGoudeau) 4 octobre 2017
Signe ultime de sa fragilité, le mari de Theresa May finit par prendre son épouse dans les bras à la fin de son allocution, pour la féliciter. La cheffe du gouvernement a essayé de rire de cette tribune ratée en publiant plus tard sur Twitter une photo de médicaments contre la toux, posés à côté de son discours :
*coughs* pic.twitter.com/1b6CoW5Mrz
— Theresa May (@theresa_may) 4 octobre 2017
Séquence 4 : la presse épingle le sursis de Theresa May
Si tous ces éléments perturbateurs n’ont pas affecté l’auditoire qui a réservé une franche ovation à Theresa May, la presse s’est montrée en revanche plus sévère. Les mésaventures de la Première ministre ont totalement éclipsé le fond de son discours, qui devait redonner de l’espoir à son parti après la défaite électorale aux législatives de juin dernier. "Le discours de la Première ministre était censé exposer sa vision pour la nation. Mais il a tourné au désastre", résume The Sun, qui consacrait sa Une comme le reste des titres britanniques à la "malchanceuse", selon l'expression du Daily Telegraph.
Pour le Guardian, "difficile" de ne pas y voir la "métaphore" d'une Première ministre "à la peine" et "à court d'idées". "A-t-on été témoin de la désintégration physique de son mandat de Première ministre ?", s'interroge le Daily Mail. Même le Telegraph, pourtant proche du mouvement conservateur, affirme que "l'avenir politique de Theresa May était en balance" mercredi soir. Le journal affirme qu’une trentaine de députés seraient prêts à demander le départ de Theresa May, alors qu’il en faut 48 pour provoquer un vote de défiance au Parlement. Les spéculations sur son départ anticipé du 10 Downing Street sont désormais relancées.