Le tribunal international parrainé par l'ONU a jugé pour la première fois vendredi que les exactions commises entre 1975 et 1979 au Cambodge constituaient "un génocide" au regard du droit international. Il a aussi condamné à la perpétuité les deux plus hauts dirigeants khmers rouges encore en vie
Le génocide "est établi". La chambre a jugé que "le crime de génocide était établi" à l'égard des Vietnamiens, de la communauté musulmane cham et d'autres minorités religieuses et qu'il visait à "établir une société athée et homogène (en) supprimant toutes les différences ethniques, nationales, religieuses, raciales, de classe et culturelles".
Autodafés de Corans, noyades collectives: entre 100.000 et 500.000 chams, sur un total de 700.000, ont été tués entre 1975 et 1979. Pour Youk Chhang, chef du Centre de Documentation du Cambodge, un organisme de recherche qui a fourni de nombreuses preuves au tribunal, ce verdict "pourrait aider à refermer un chapitre horrible de l'histoire cambodgienne".
Un verdict historique. Ce tribunal a aussi rendu un verdict historique en condamnant l'idéologue du régime Nuon Chea, 92 ans, et le chef de l'Etat du "Kampuchéa démocratique" Khieu Samphan, 87 ans. Ils avaient déjà été condamnés à la perpétuité en 2014 pour "crimes contre l'humanité". Le régime des Khmers rouges a conduit à la mort près de deux millions de personnes entre 1975 et 1979. Nuon Chea "a eu une contribution significative à la commission des crimes", "il détenait le pouvoir de décision ultime" avec Pol Pot, a relevé le juge Nil Nonn. Quant à Khieu Samphan, il était "le visage" du mouvement ultra-maoïste.
Le dernier procès intenté contre des Khmers ? Lors de ce second procès, qui sera probablement le dernier intenté contre d'ex-membres du régime ultra-maoïste, une centaine de témoins sont passés à la barre pour dénoncer décapitations, viols, mariages forcés et cannibalisme. Les deux accusés ont nié les atrocités.
Bien que les exactions aient été perpétrées à très grande échelle entre 1975 et 1979, le Premier ministre actuel, Hun Sen, lui-même ancien cadre khmer rouge, a demandé à plusieurs reprises qu'aucun autre suspect ne soit renvoyé devant le tribunal, insistant sur le fait que cela pourrait provoquer des troubles dans le royaume.