Vont-ils renoncer à leurs millions d'euros ? Six mois après la révélation de l'affaire des moteurs truqués, l'Allemagne a les yeux rivés sur les dirigeants de Volkswagen, dont certains se braquent manifestement contre la suppression de leurs juteux bonus. Objet du litige: la composante variable de la rémunération des neuf membres du directoire de Volkswagen que plusieurs membres du conseil de surveillance voudraient voir supprimée. Le patron de Volkswagen Matthias Müller, l'un des bénéficiaires, a proposé de la réduire de 30%, selon la presse, pour ériger un exemple en ces temps de vaches maigres.
Le patron le mieux payé d'Allemagne. Son prédécesseur Martin Winterkorn, parti précipitamment en septembre dernier, a été plusieurs années de suite le patron le mieux payé d'Allemagne. En 2014, 13,9 millions sur un total de 15,8 millions étaient du bonus. Les autres membres du directoire ont perçu chacun entre 4 et 7 millions d'euros de rémunération variable cette année-là.
Renoncer... sûrement. Qu'en sera-t-il pour 2015 ? Théoriquement, les dirigeants auraient le droit à un bonus, celui-ci étant calculé sur la base de la performance sur plusieurs années. Dans le contexte actuel, il serait plus avisé d'y renoncer, considère l'Etat régional de Basse-Saxe, actionnaire qui a "une conscience aigüe du problème des bonus variables". Mais les intéressés se rebiffent. Une réunion du conseil de surveillance resserré lundi n'a pas permis d'avancer sur la question.
Une perte de plusieurs milliards en 2015. Volkswagen, qui a avoué en septembre dernier avoir truqué les moteurs diesel de 11 millions de voitures dans le monde pour les faire paraître moins polluantes qu'elles ne sont en réalité, va afficher pour l'année 2015 une perte, vraisemblablement de plusieurs milliards. La faute à des provisions que la société doit constituer pour faire face aux coûts liés à ce "dieselgate". Ces coûts recouvrent la remise aux normes des voitures concernées ainsi que les indemnités et pénalités à prévoir dans plusieurs pays, dont l'ampleur n'est pas encore connue.
Une première depuis 1980. Le groupe, propriétaire de douze marques et avec 200 milliards d'euros de chiffre d'affaires et qui publiera ses résultats annuels le 28 avril, pourrait aussi priver ses actionnaires de dividende, une première depuis le début des années 1980.
Médias et politiques vent debout. "Volkswagen est un exemple effrayant de l'éloignement qui règne entre les managers et le reste de la société", a commenté le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung, se demandant si le patron de Volkswagen était "la bonne personne au bon endroit". Maintenir les bonus serait "une gifle" pour les 600.000 salariés de Volkswagen, a critiqué pour sa part Herbert Behrens, le député de l'opposition de gauche Die Linke. Même le ministre des Finances Wolfgang Schäuble s'est fendu d'un commentaire lundi soir : "il y a des discussions à propos desquelles on ne comprend pas que les intéressés ne réalisent pas à quel point elles ne sont pas compatibles avec certaines valeurs".