Londres et Canberra ont accusé jeudi le renseignement militaire russe (GRU) d'avoir mené les principales cyberattaques mondiales de ces dernières années, les Pays-Bas annonçant de leur côté avoir expulsé quatre agents russes qui tentaient de pirater le siège de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques à La Haye. Plus tôt dans la matinée, les autorités néerlandaises ont révélé comment les agents russes avaient positionné un véhicule truffé d'équipements électroniques sur le parking d'un hôtel proche du siège de l'OIAC dans le but de pirater son système informatique.
Les Pays-Bas, qui ont bénéficié de la coopération de Londres, ont identifié les présumés agents russes, précisant que l'opération était selon eux coordonnée par le renseignement militaire russe (GRU). Pour la première fois, le GRU, donc le Kremlin, a été aussi spécifiquement mis en cause jeudi par Londres, qui l'accuse déjà d'être responsable de l'empoisonnement de l'ex-agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia le 4 mars à Salisbury, dans le sud-ouest de l'Angleterre.
"Un sentiment d'impunité". Le ministère britannique des Affaires étrangères a dénoncé dans un communiqué les cyberattaques "sans foi ni loi" menées par le GRU contre le parti démocrate américain, l'agence sportive anti-dopage ou encore l'aéroport d'Odessa, en Ukraine, qui ont "affecté des citoyens dans de nombreux pays, dont la Russie, et coûté des millions de livres aux économies nationales". "Ce type de comportement démontre leur désir d'opérer sans tenir compte du droit international ou des normes établies, et d'agir avec un sentiment d'impunité et sans considérer les conséquences", a tonné le chef de la diplomatie Jeremy Hunt. "Notre message est clair. Avec nos alliés, nous révèlerons et répondrons aux tentatives du GRU de saper la stabilité internationale", a-t-il promis.
Moscou ironise sur "l'imagination féconde" des Britanniques. Ces accusations ont été accueillies avec ironie par Moscou. "De manière indiscriminée, ils ont mélangé tout dans un seul flacon. Peut-être est-ce un flacon de parfum Nina Ricci? (en référence au flacon de Novitchok, ndlr). Le GRU, les cyber-espions, les 'hackers du Kremlin', l'Agence mondiale antidopage. C'est un sacré mélange pour un parfum", a plaisanté la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova. "L'imagination féconde de nos collègues britanniques ne connaît décidément pas de limites. Qui a inventé tout ça? J'aimerais bien le voir. Ce sont de vrais Andersen", du nom de l'auteur de contes danois, ndlr, a-t-elle ajouté.
Différentes attaques, différentes appellations pour une seule entité. Le Centre national de cybersécurité britannique (NCSC) a pu déterminer que le GRU se cachait derrière plusieurs attaques commises dans le monde par des groupes de pirates connus comme "Fancy Bear", "Sandworm", "Strontium", "APT 28", "CyberCaliphate", "Sofacy", "BlackEnergy Actors", différentes appellations désignant parfois une seule et même entité. "Ce ne sont pas les actions d'une grande puissance, mais les actions d'un Etat paria", a dénoncé le ministre britannique de la Défense, Gavin Williamson, à son arrivée à Bruxelles jeudi pour des discussions avec ses partenaires de l'Otan.