Le parquet luxembourgeois a décidé de faire appel des décisions rendues fin juin contre deux lanceurs d'alerte et un journaliste à l'origine du scandale LuxLeaks sur les pratiques fiscales de grandes multinationales établies au Grand-Duché, a-t-on appris mardi auprès de l'administration judiciaire du Luxembourg.
Le journaliste visé ? "Le parquet a fait un appel général en fin de semaine dernière", a déclaré Henri Eippers, porte-parole de la justice luxembourgeoise. Deux "lanceurs d'alerte" français, Antoine Deltour et Raphaël Halet, employés par la firme d'audit PricewaterhouseCoopers, avaient déjà fait appel de leur condamnation respectivement à 12 et 9 mois de prison avec sursis. Selon Henri Eippers, l'appel du parquet "vaut donc surtout pour" le troisième prévenu, Edouard Perrin, 45 ans, journaliste de France 2 qui sera lui aussi rejugé alors qu'il avait été acquitté. C'est lui qui avait révélé dans l'émission "Cash Investigation" les pratiques fiscales décriées du Grand-Duché grâce aux documents transmis par Antoine Deltour.
18 mois de prison. A l'issue d'un procès qui s'est déroulé en avril et mai, le parquet avait requis 18 mois de prison, éventuellement avec sursis, contre Antoine Deltour, 31 ans, et Raphaël Halet, 40 ans. Ces deux anciens employés au Luxembourg de PwC avait fait fuiter près de 30.000 pages éclairant les pratiques fiscales de grandes multinationales établies au Grand-Duché. Le cabinet d'audit PwC, qui s'était constitué partie civile dans ce procès, a obtenu un euro symbolique de dommage et intérêt. Lors des plaidoiries, la défense avait demandé l'acquittement pur et simple des prévenus, qui avaient affirmé avoir servi l'intérêt général.
Des révélations détonnantes. Les milliers de pages confidentielles sur les pratiques d'optimisation fiscale rendues publiques par les deux lanceurs d'alerte et le journaliste de France 2 détaillaient 548 "rescrits fiscaux" - concernant plus de 350 sociétés - généreusement accordés par l'administration et négociés par PwC pour le compte de ses clients. En utilisant certaines niches, les rescrits permettent aux multinationales d'échapper en partie ou totalement à l'impôt dans les pays européens où elles sont installées. Les faits datent de l'époque où Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, était Premier ministre du Luxembourg (1995-2013).