Des milliers de manifestants se sont de nouveau rassemblés vendredi soir à Al-Hoceima, dans le nord du Maroc, afin d'exiger justice pour un vendeur de poisson, mort écrasé dans une benne à ordure fin octobre. "Mouhcine, repose-toi, nous continuons le combat", scandait notamment la foule, rassemblée sur la grande Place des martyrs d'Al-Hoceima, ville côtière de la région du Rif, selon des images diffusées en direct sur les réseaux sociaux.
Un cortège à travers les rues. Avec une bougie ou une fleur à la main, les manifestants, dont beaucoup de jeunes, ont ensuite marché dans les rues de la ville. Quelques-uns brandissant des portraits de la victime, Mouhcine Fikri, des drapeaux amazigh (berbère) et de la République du Rif (république éphémère créée dans les années 1920 lors de la révolte contre le colonisateur espagnol). "Vive les Amazigh", "Le peuple veut les meurtriers du martyr", pouvait-on notamment entendre dans le cortège.
Une mort atroce. Mouhcine Fikri, âgé d'une trentaine d'années, a été écrasé le 28 octobre dans une benne à ordures à Al-Hoceima (nord). Il tentait alors de s'opposer à la destruction de sa marchandise, de l'espadon, une espèce interdite à la pêche à cette époque. Les circonstances atroces de sa mort ont provoqué une vague de manifestations à Al-Hoceima, dans la région du Rif, et des rassemblements de moindre ampleur dans quelques grandes villes.
Le mépris des autorités. Les participants ont dénoncé en particulier la "hogra" du système, un terme désignant l'arbitraire et le mépris affichés selon eux par les autorités envers les citoyens ordinaires. Les manifestations ont depuis marqué le pas, mais l'indignation reste vive à Al-Hoceima. Onze personnes, dont des responsables de l'administration des pêches et des cadres du ministère de l'Intérieur, soupçonnées notamment "d'homicide involontaire" ont été présentées à un juge d'instruction, et huit d'entre elles incarcérées.
"Broie-le". Les organisateurs de ce nouveau rassemblement, le "Comité de protestation contre le meurtre de Mouhcine", exigent en particulier de savoir qui a actionné le mécanisme de la benne à ordure - ce que l'enquête n'a pas encore dit -, et si l'expression "broie-le" (ou plus exactement l'insulte "écrase sa mère") a été prononcée. Ce point en particulier avait enflammé les réseaux sociaux et suscité la colère des habitants, certains suspectant qu'un ou des représentants de l'autorité avaient ordonné ou volontairement mis en marche le mécanisme de compactage alors que Fikri était à l'arrière du camion. Le "Comité" a réclamé également plus de mesures pour lutter contre la marginalisation de la région.