Pologne : Lech Walesa a-t-il collaboré avec la police secrète ?

© WOJTEK RADWANSKI / AFP
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Des documents censés prouver la collaboration de l’ancien président polonais avec la SB ont été rendus publics. "Faux", clame l'intéressé.

Ils sont enfin rendus publics. Des lettres manuscrites, qui auraient été écrites par l’ancien président polonais, prouveraient que Lech Walesa a collaboré avec la police communiste. Mais l’intéressé, qui habite aujourd’hui aux Etats-Unis, dément et parle de faux.

Pas d’expertise graphologique. C’est l'Institut polonais de la mémoire nationale (IPN), organisme d'Etat qui instruit les crimes communistes, qui a présenté lundi aux médias des documents censés prouver la collaboration dans les années 1970 du chef historique de Solidarnosc Lech Walesa avec la police secrète (SB). Tous ces documents ont été retrouvés la semaine dernière par IPN chez la veuve de l'ancien ministre de l'Intérieur communiste Czeslaw Kiszczak.

Les photocopies des documents, publiés sans expertise graphologique, contiennent plusieurs notes manuscrites. Parmi elles figurent un engagement à la collaboration signé Lech Walesa "Bolek", son pseudonyme, des reçus d'argent, signés aussi sous de "Bolek"", ainsi que des rapports dactylographiés ou manuscrits de conversations que des fonctionnaires de la SB auraient eu avec "Bolek" dans les années 1970-1976.

L'un des derniers documents, une note manuscrite d'un fonctionnaire de la SB datée du 8 juin 1976, annonce le refus de l'agent "Bolek" de poursuive la collaboration. "Suite à son comportement arrogant, j'estime inopportun de poursuive les contacts avec lui", a-t-il conclu.

" Ce sont des faux grossiers. Je n'ai rien à voir avec cela "

L'ancien président polonais, prix Nobel de la paix, en 1993, qui réside aux Etats-Unis, a nié cette collaboration. Il a reconnu avoir commis "une erreur" en signant à l'époque "des papiers",  tout en niant avoir été un "dénonciateur". "Ce sont des faux grossiers. Je n'ai rien à voir avec cela", a-t-il de nouveau assuré lundi, interrogé par des télévisions polonaises.

Lech Walesa, 72 ans, qui était ouvrier des chantiers navals de Gdansk lors d'une révolte ouvrière réprimée dans le sang en décembre 1970, a toujours assuré qu'il ne s'était pas "laissé briser" à l'époque. "Je n'ai pas collaboré avec les SB. Je n'ai jamais touché d'argent ni fait de rapports écrits ou oraux", a assuré celui qui dirigeait la Pologne de 1990 à 1995. Selon lui, ces documents ont été "falsifiés" par la SB.

La chute du régime en question. L'affaire de ses contacts présumés avec la police politique à l'époque communiste a permis aux conservateurs au pouvoir en Pologne de relancer leur thèse selon laquelle la chute du régime en 1989 n'était qu'une opération des services spéciaux.

Cette idée de complot qui aurait été fomenté avec les services soviétiques pour permettre aux élites ex-communistes de garder le pouvoir réel dans le pays, circule depuis longtemps dans les milieux nationalistes, proches du parti au pouvoir Droit et Justice (PIS). Elle est jugée absurde par nombre d'anciens opposants anticommunistes.

Ces documents "sont terrifiants. Selon l'historien Slawomir Cenckiewicz, co-auteur d'un livre sorti en 2008 qui accuse Lech  Walesa de collaboration avec la SB, ces documents "sont terrifiants, compte tenu de l'échelle de dénonciation portant sur de nombreuses personnes". "Seul quelqu'un de naïf pourrait croire que ces documents n'ont pas eu d'incidence sur la période suivante", quand Lech Walesa dirigeait le mouvement Solidarité, a-t-il affirmé.

"On fait confiance à Lech pour tout ce qu'il a fait", a déclaré pour sa part lundi Zbigniew Janas, ancien ouvrier et opposant au régime communiste. Dans les années 1970, avant Solidarnosc né en 1980, "nous, les ouvriers, nous étions complétement seuls" face au régime. "Nous allons te défendre, Lech, tu ne resteras pas seul!", a-t-il assuré.