Si l'Europe et les États-Unis sont aujourd'hui les zones les plus touchés par le Covid-19, le continent africain ne compte que 2.702 décès et 81.294 cas sur 1,2 milliard d'habitants. Comment expliquer cette résistance face au Covid-19 ? Isabelle Defourny, directrice des opérations MSF France, a donné quelques éléments de réponses dimanche sur Europe 1.
"L'épidémie a été prise au sérieux"
Pour Isabelle Defourny, cette faible pénétration du virus dans les pays africains s'explique d'abord par des mesures sanitaires précoces. "L'épidémie a été prise au sérieux très rapidement par les dirigeants africains et beaucoup de mesures de lutte contre l'épidémie ont été mises en place très précocement", affirme-t-elle. Elle cite notamment la limitation des grands rassemblements, des "déplacements réduits", des "confinements à domicile" dans certains pays, associé au "port du masque", qui est très fréquent en Afrique.
Certains pays africains ont également gardé en mémoire les traumatismes du virus Ebola. "Des mesures ont été mis en place dans des pays où il y existe une habitude et une expertise dans les réponses aux épidémies et où les systèmes de santé savent s'adapter à une épidémie", précise ainsi Isabelle Defourny. La population sait également comment réagir face à une telle crise sanitaire. Les Africains "savent que leurs systèmes de santé ne sont pas extrêmement solides et que pour se protéger, ils doivent compter sur eux", indique Isabelle Defourny.
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Autre explication : la structure de la population africaine. Celle-ci présente peu de facteurs de risques en comparaison avec les populations américaine et européenne. "Il semble que les facteurs prépondérants soient l'âge, le sexe [les hommes sont plus touchés] et certains facteurs de risques comme le diabète", détaille la médecin. Or, la population africaine est jeune : 60% des Africains sont âgés de moins de 25 ans.
Une épidémie en progression
Le VIH, qui touche par exemple 8 millions de Sud-Africains, aurait pu faire partie des facteurs aggravants de la maladie. Mais selon Isabelle Defourny, il n'en est rien. "Au début de l'épidémie on craignait que des populations par exemple touchées par le VIH régissent très mal au virus. Or ce n'est pas du tout ça que l'on voit", reconnaît-elle. Elle estime qu'il est encore "trop tôt" pour savoir si la mortalité augmente en cas d'infection au VIH.
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Si les pays africains connaissent une lente hausse des cas de coronavirus, Isabelle Defourny estime que le continent n'est pas encore sorti d'affaire. "C'est important de garder à l'esprit qu'on voit peu de cas sévères dans les pays d'Afrique mais l'épidémie continue de progresser dans beaucoup de pays", dit-elle. Selon elle, "l'épidémie est encore en phase ascendante". Mais Isabelle Defourny ne croit pas à un scénario catastrophe. "On ne pense pas que ça amènera une vague absolument massive de mortalité mais il est probable qu'encore beaucoup de personnes décèdent" du Covid-19.