Sur la sellette après une série de scandales accablants, Boris Johnson a vécu mercredi sa séance hebdomadaire de questions au Parlement la plus difficile depuis son arrivée triomphante au pouvoir en juillet 2019, en sauveur d'un Brexit dans l'impasse. L’opposition travailliste réclame sa démission, le parti conservateur semble prêt à le lâcher, et tout cela à cause d’une "garden party" au 10 Downing Street en plein confinement. L'éditorialiste Vincent Hervouët revient ce jeudi sur les malheurs de BoJo.
Élever une statue de Tartuffe
"Molière est à la mode, Valérie Pécresse voudrait déménager au Panthéon ce génie tellement français… Mais c’est à Tartuffe sa créature qu’il faudrait élever une statue. Grâce au Covid, il s’exporte dans le monde entier. La presse de Londres, l’opposition de Sa Majesté, les rivaux conservateurs de Boris Johnson veulent le punir. Pas seulement mettre BoJo au coin, ils veulent lui faire la peau.
Le chasser du pouvoir ou le contraindre à démissionner. Tout cela parce qu’il a bu, mangé et débattu avec ses collaborateurs pendant le confinement. Il semble même qu’ils aient ri dans les jardins du 10 Downing Street. C'est mal aux yeux des anglais puritains et pire encore aux yeux de ceux qui ne lui pardonnent pas le Brexit.
Une photo en mai 2020 montre en effet BoJo sur la terrasse de son bureau, le plateau de fromages et les verres de rosé circulent. Il a beau dire qu’ils étaient au travail, qu’ils parlaient du travail et que travailler en plein vent était recommandé par le docteur Diafoirus, le royaume est choqué. La presse a recensé une dizaine de fêtes, de pots d’adieu, de 'garden party' entre mai et décembre.
C’est parfaitement hypocrite de reprocher aux dirigeants politiques qui travaillaient nuit et jour au plus fort de la crise d’avoir pris des risques. Que ceux qui n’ont jamais oublié de mettre du gel leur jettent le premier masque. En même temps, Johnson et sa bande semblent si désinvoltes alors qu’ils ont confiné les sujets du royaume à la maison, leur interdisant d’aller visiter leurs amis, leurs amours, leurs vieux parents. Le scandale est à la mesure des privations que se sont infligés les Britanniques.
Mea culpa devant les députés
Mercredi, Boris Johnson a donc fait son mea culpa à la Chambre des Communes. Il soutient que les règles de distanciation étaient respectées, mais concède que ce n’est pas la perception qu’en ont les Britanniques. Devant ses collègues assoiffés de sang, il a pris un air de chien battu qui lui va très bien.
Partout les dirigeants ont été surpris en train de transgresser les règles sanitaires. Le président autrichien a été verbalisé pour avoir violé le couvre feu, l’Argentin célébrant avec des amis l’anniversaire de sa femme, l’Israélien fêtant Pâques en famille, Poutine serrant les mains des médecins, le commissaire européen au commerce banquetant dans un golf.
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Les ministres de la Santé d’Afrique du sud, de Malaisie, de Nouvelle-Zélande tous démissionnés pour avoir oublié les règles tatillonnes, la Première ministre finlandaise en boîte de nuit, le roi des Pays-Bas prenant des bains de foule, Nancy Pelosi chez le coiffeur, etc, etc... Tous ont transgressé les règles qu’ils imposaient aux autres. Peu ont démissionné, c’est juste affaire de rapport de force.
Boris Johnson menacé ?
Le Premier ministre britannique a dévissé dans les sondages, mais il est raccord avec son image de sale gosse. Dans le parti conservateur, il est trop tôt pour s’en débarrasser. Lui-même a renvoyé toute décision après l’enquête interne. Elle sera publiée au printemps, au moment des élections locales. Si le parti gagne, le parti oubliera ses 'garden parties'. Si non, il fera un parfait bouc émissaire.
Le vrai drame britannique qui s’est joué mercredi, c’était à New York, où la plainte pour agression sexuelle a été retenue contre le prince Andrew, l’ami de Jeffrey Epstein et de Ghislaine Maxwell. Ça, ce n’est plus une comédie de Molière, mais une tragédie shakespearienne. Il y aurait quelque chose de pourri au royaume d’Elisabeth."