L'expulsion plutôt que de garder les criminels étrangers en prison? Les Suisses se prononcent sur une proposition controversée du parti anti-immigration, l'Union démocratique du centre (UDC), d'expulser automatiquement, même pour des infractions mineures, les criminels étrangers. Régulièrement sollicités par des référendums et initiatives populaires qui forment le socle de la démocratie suisse, les électeurs ont dans leur très grande majorité déjà voté par correspondance et via l'internet. Les premières estimations étaient attendues en début d'après-midi.
Les infractions mineures concernées. En 2010, les Suisses avaient déjà accepté, à 52,9%, une initiative de l'UDC, premier parti suisse, demandant le renvoi des criminels étrangers. Mais le Parlement a introduit en mars dernier une clause limitant cette possibilité en permettant aux juges d'éviter l'expulsion automatique des condamnés dans certains cas. Cette fois, le peuple suisse est consulté sur une initiative beaucoup plus dure réclamant "le renvoi effectif des criminels étrangers". Cette initiative de "mise en oeuvre" de l'automaticité élargit la liste des motifs d'infraction entraînant l'expulsion. Elle demande le renvoi automatique de tout étranger ayant déjà été condamné au cours des 10 dernières années, qui serait reconnu coupable d'avoir commis des infractions mineures comme des "lésions corporelles simples" ou d'avoir participé à une rixe.
Les deux camps au coude à coude. Le gouvernement et le Parlement jugent la proposition de l'UDC contraire aux "règles fondamentales" de la démocratie. Aucun autre parti national, ni les syndicats et milieux économiques, ne soutiennent l'initiative. L'initiative populaire est un droit donné aux citoyens suisses de faire une proposition de modification de loi. L'adoption d'un tel projet requiert la double majorité: la majorité du peuple (majorité des suffrages valables) et la majorité des cantons. D'après le dernier sondage réalisé par l'institut gfs.bern, publié le 17 février, les deux camps sont presque à égalité, avec un léger avantage pour les opposants, à 49% contre 46%. Mais l'issue du scrutin reste ouverte, avec 5% d'indécis.
Jusqu'à 10.200 expulsables. L'UDC a bousculé le jeu politique ces dernières années avec notamment des campagnes réussies pour interdire la construction de minarets et contre ce qu'elle a appelé "l'immigration de masse". Cette fois, elle souligne que sur 10 criminels dans les prisons suisses, 7 sont des étrangers. "Les étrangers ayant commis des délits graves et les étrangers récidivistes ne méritent plus de rester sur notre sol", estime le parti, dont les affiches électorales représentent un mouton noir expulsé du drapeau suisse par un mouton blanc. D'après l'Office fédéral de la statistique, la révision du code pénal adoptée l'an dernier par le Parlement aurait pu conduire en 2014 à l'expulsion de près de 3.900 personnes, contre 500 en moyenne. Avec l'initiative de l'UDC, ce chiffre aurait bondi à 10.200.