La colère monte en Syrie. Près de 60 de villageois des environs de la ville de Minbej, qui compte 50.000 habitants, ont péri dans des bombardements aériens dans la nuit du 18 au 19 juillet. Cette localité située à 100 km au nord-est d’Alep, est tenue par l’organisation djihadiste Etat islamique. Parmi les victimes, des civils, figuraient des enfants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Il s’agit de la plus grosse bavure, connue, de la coalition internationale.
Qui sont les victimes des frappes de la coalition ?
Les frappes ont eu lieu avant l’aube, par des avions de la coalition, alors que les habitants fuyaient les combats dans le village d'al-Toukhar, près du fief djihadiste de Minbej, a indiqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH.
"Il y a eu au moins 56 morts civils, dont 11 enfants, et des dizaines de blessés, dont certains grièvement atteints", a-t-il, s’appuyant sur un vaste réseau de sources médicales et de militants à travers la Syrie. "C'est vraisemblablement une erreur", a-t-il estimé.
Comment la coalition explique-t-elle cette bavure ?
L’AFP a interrogé la coalition, qui a répondu par e-mail. Elle confirme avoir "récemment" procédé à des frappes près de Minbej. La coalition dit également être consciente des informations sur la mort de civils. "Nous allons examiner toutes les informations dont nous disposons sur l'incident. Nous prenons toutes les dispositions pendant nos missions pour éviter ou minimiser les pertes civiles (...) et nous conformer aux principes du droit de la guerre".
Washington a également réagi, jeudi matin, promettant la transparence sur les victimes civiles, par la voix de son ministre de la Défense, Ashton Carter. "Nous allons enquêter" sur ces accusations et "nous serons transparents là-dessus", a-t-il dit devant la presse, à l'issue d'une réunion des ministres de la Défense de la coalition sur la base aérienne d'Andrews, en banlieue de Washington. "Nous continuerons à faire tout ce que nous pourrons pour protéger les civils" pendant les bombardements, a-t-il ajouté.
Amnesty International a exhorté la coalition à "redoubler d'efforts pour empêcher la mort de civils et à enquêter sur de possibles violations du droit humanitaire international", expliquant qu'il s'agit "peut-être du bombardement le plus coûteux en vie de civils" par la coalition depuis le début en 2014 de ses opérations anti-djihadistes en Syrie.
#Syria: Alarm over reports of high civilian death toll from US-led coalition airstrikes. https://t.co/BrJL2tD3r0pic.twitter.com/xWPUBaJBtm
— AmnestyInternational (@amnesty) July 19, 2016
Pourquoi cette ville est-elle une cible importante pour la coalition ?
Minbej servait aux djihadistes comme principal carrefour d'approvisionnement, de la frontière turque vers les zones sous leur contrôle dans le nord syrien. Cette ville et ses environs sont donc visés depuis le 31 mai par une offensive des Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les Etats-Unis, qui cherchent à reprendre la ville.
La coalition internationale frappe quotidiennement cette cité qui compte encore des dizaines de milliers de civils et où les FDS sont parvenues à pénétrer il y a plusieurs semaines. Les combats s'y poursuivent, mais les forces démocratiques syriennes avancent lentement en raison des mines et surtout d'une résistance farouche du groupe ultraradical qui mène des attentats suicide et à la voiture piégée contre leurs positions. Des dizaines de milliers de civils ont déjà réussi à s'enfuir de la ville avec l'aide des FDS.
Quelles sont les réactions en Syrie ?
Le principal groupe d'opposition syrien a appelé mercredi la coalition anti-djihadistes à suspendre ses frappes contre le groupe État islamique (EI). "Le président de la Coalition (de l'opposition syrienne), Anas al-Abdé, a envoyé une lettre urgente aux chefs de la diplomatie des pays membres de la coalition anti-EI après les massacres horribles près de Minbej dans le nord-est d'Alep par des avions de la coalition", selon un communiqué. Il a "demandé la suspension immédiate des opérations militaires de la coalition en Syrie afin de permettre une enquête approfondie", poursuit le texte. L'opposition, quant à elle, a évoqué dans son communiqué le chiffre de 125 civils tués.