Pour la première fois depuis 2009, un missile nord-coréen a survolé l'archipel japonais tôt mardi matin (vers 23 heures, heure de Paris). Le "projectile non-identifié", dixit un communiqué de l'état-major sud-coréen, est passé au-dessus de l'île la plus au Nord du Japon, Hokkaido. Des sirènes ont retenti et des alertes ont été diffusées sur les smartphones des habitants, dans les métros et les télévisions publiques. S'il n'est pas directement menacé, le Japon tente tout de même de se protéger.
De vrais moyens militaires... Le Japon n'a plus d'armée depuis 1945, mais le pays possède une force d'auto-défense depuis 1954. Une "vraie" armée que le Premier ministre Shinzo Abe s'efforce de doter de plus de moyens. Le pays possède des destroyers avec des missiles intercepteurs depuis 2012, qui croisent aux côtés des destroyers américains, rappelle Le Monde.
Les Japonais possèdent aussi des systèmes de détection et de poursuite de missile. Des boucliers Thaad (Terminal High Altitude Area Defense) - conçus pour intercepter et détruire des missiles balistiques de portées courte, moyenne et intermédiaire - sont également en cours de déploiement sur le sol nippon.
Un dispositif renforcé mardi, depuis le tir nord-coréen. La force d'auto-défense a en effet déployé des systèmes d'interception sol-air de type PAC-3 sur la base aérienne américaine de Yokota, à Tokyo. Des mesures qui n'empêchent pas certains Japonais d'investir dans des abris anti-atomiques et des purificateurs d'air contre les radiations et les gaz toxiques depuis l'accélération des essais balistiques nord-coréens.
… mais à l'efficacité limitée. Tous ces dispositifs auraient toutefois un effet limité en cas de tir de missile qui ciblerait le Japon. "L'interception d'un missile est possible seulement lorsqu'il est en phase de réception. Et encore, seuls les États-Unis ont la capacité de le faire efficacement. Et quand le missile est en très haute altitude [comme cela a été le cas cette nuit], c'est encore plus compliqué", détaille Jean-Vincent Brisset, directeur de recherches à l'IRIS et spécialiste des questions de sécurité en Asie, à Europe1.fr. Les moyens japonais risquent donc d'être limités en cas d'agression réelle.
" On n'aura pas de Hiroshima. Seuls les États-Unis sont visés "
Un danger à relativiser. Reste qu'une agression armée de la Corée du Nord en direction de l'Etat nippon s'avère relativement hypothétique. "Si la menace nord-coréenne pèse sur le Japon, le pays n'est pas directement visé", rappelle Vincent Brisset. Le tir de cette nuit est un essai et non d'une menace sérieuse envoyée au Japon. "On n'aura pas de Hiroshima. Seuls les États-Unis sont visés", assure le spécialiste. Si Pyongyang devait toucher le Japon, ce serait selon lui uniquement pour atteindre les bases américaines qui y sont installées. Selon un traité de coopération mutuelle, ce sont les États-Unis et leurs 47.000 soldats sur place, qui sont chargés d'assurer la sécurité du Japon.
Des démonstrations de force destinées avant tout aux Nord-Coréens eux-mêmes. Et pour l'heure, même une attaque à l'encontre des Etats-Unis semble peu probable. La Corée du Nord a fait baisser les tensions avec les États-Unis en annonçant qu'elle mettait en pause ses tirs en direction du territoire américain de Guam à la mi-août. Selon le programme initialement annoncé par le régime nord-coréen, quatre missiles auraient dû passer au-dessus du Japon pour atteindre cette île du Pacifique. Mais Pyongyang semble avoir mis de l'eau dans son vin et ralenti l'escalade verbale entre les dirigeants des deux pays.
"Il ne faut pas oublier que les démonstrations de force de la Corée du Nord sont destinées avant tout aux Nord-Coréens eux-mêmes", observe Jean-Vincent Brisset. "Kim Jong-Un doit continuer de se présenter comme le protecteur du peuple" et pour cela, il doit y entretenir le sentiment d'une menace qui pèserait sur le pays.