L'état d'urgence instauré en Turquie après la tentative de putsch de juillet 2016, qui a permis aux autorités de mener de vastes purges, est arrivé à expiration tôt jeudi, a rapporté l'agence de presse étatique Anadolu. Ce régime d'exception, qui élargit les pouvoirs du président et des forces de sécurité, avait été initialement mis en place le 20 juillet 2016 pour une durée de trois mois, puis avait été sans cesse prolongé depuis.
Dernière prolongation le 19 avril. La septième et dernière extension de trois mois, qui avait débuté le 19 avril, a expiré jeudi à 01h (mercredi 23 heures en France). Le gouvernement turc avait annoncé la semaine dernière qu'il n'y aurait pas de nouvelle prolongation.
Un outil pour faire taire les critiques ? Sous l'état d'urgence, les autorités turques ont traqué de façon implacable les putschistes présumés et les personnes perçues comme leurs sympathisants, mais ont aussi visé des opposants prokurdes, des journalistes critiques et des ONG. Selon le gouvernement, l'état d'urgence était nécessaire pour permettre aux forces de sécurité de lutter efficacement contre toute menace dans la foulée de la tentative de coup d'Etat du 15 au 16 juillet 2016. Cependant, des organisations de défense des droits de l'Homme et des responsables occidentaux accusent le président Recep Tayyip Erdogan d'avoir mis à profit l'état d'urgence pour réduire au silence toute voix critique. L'état d'urgence reste associé en Turquie aux purges rythmées par des décrets-lois souvent publiés la nuit annonçant le limogeage ou la suspension de milliers, voire de dizaines de milliers de fonctionnaires à la fois.
Un projet de loi "antiterroriste" au Parlement cette semaine. La levée de l'état d'urgence survient moins d'un mois après la victoire de Recep Tayyip Erdogan à des élections cruciales qui lui ont apporté de nouveaux pouvoirs, comme la possibilité d'émettre dans de nombreux domaines des décrets à valeur de loi, comme sous l'état d'urgence. L'annonce de la levée de l'état d'urgence n'avait pas rassuré l'opposition, qui accuse le gouvernement de vouloir prolonger ses effets à travers un projet de loi "antiterroriste" présenté cette semaine au Parlement.
Ce texte contient plusieurs mesures inspirées de l'état d'urgence, comme la possibilité pour les autorités de continuer de limoger les fonctionnaires liés à des "groupes terroristes" pendant encore trois ans. Une autre mesure, très critiquée, vise à élargir les pouvoirs des gouverneurs des provinces, qui pourraient restreindre les déplacements de certains individus ou interdire l'accès à certaines zones.