Une fois encore, une quarantaine de missiles et autant de drones ont visé le réseau électrique ukrainien, si bien que le président Volodymyr Zelensky a imploré ses alliés occidentaux de fournir au plus vite à son pays des systèmes de défense antiaérienne. Parallèlement, confrontée à de multiples attaques terrestres sur la ligne de front, l'Ukraine, qui souffre d'une pénurie de soldats volontaires, s'est finalement dotée d'une nouvelle loi sur la mobilisation, jeudi, après des mois de débats houleux au sein d'une société meurtrie par deux ans d'invasion russe.
>> LIRE AUSSI - Ukraine : 80% des centrales thermiques attaquées par des frappes russes, selon le ministre ukrainien de l'Énergie
"C'est fait ! La loi sur la mobilisation est adoptée. 283 (députés ont voté) pour", s'est félicité sur Telegram le député Oleksiï Gontcharenko. Le président de la Rada, le parlement monocaméral, doit désormais la remettre à Volodymyr Zelensky pour promulgation afin qu'elle entre en vigueur. Ce texte, qui accroît notamment les sanctions contre les réfractaires, a fait scandale en raison de la suppression à la dernière minute d'une clause prévoyant la démobilisation des soldats ayant servi 36 mois, un coup dur pour les militaires présents sur le front depuis plus de deux ans.
"C'est très injuste"
Cette décision a donc immédiatement suscité la controverse, d'autant que le système d'enrôlement actuel est jugé par de nombreux Ukrainiens injuste, inefficace et souvent corrompu. "99% des hommes veulent se reposer", expliquait à l'AFP Iévguén, un parachutiste de 39 ans basé dans la région orientale de Donetsk. "Il y a des militaires qui ne sont pas rentrés chez eux depuis un an. C'est très injuste".
A la place, le gouvernement sera chargé de prochainement rédiger un autre projet de loi sur "l'amélioration des mécanismes de rotation du personnel militaire". Pour Volodymyr Zelensky, l'important, disait-il récemment, est de ne pas perdre en compétences militaires au moment des remplacements des soldats engagés sur le front depuis des mois par de nouveaux arrivants.
Reste toutefois que l'armée ukrainienne, affaiblie par une contre-offensive avortée à l'été 2023 et une aide occidentale qui s'épuise, doit renouveler ses troupes, déjà en sous-effectifs face à une armée russe qui engrange les volontaires et forte d'une économie tournée vers l'effort de guerre. A cette fin, Volodymyr Zelensky avait déjà entériné début avril l'abaissement de 27 à 25 ans de l'âge de mobilisation.
"Objectifs atteints"
Sur le terrain, la Russie a tiré dans la nuit de mercredi à jeudi plus de 40 missiles et 40 drones contre des infrastructures énergétiques ukrainiennes. Le ministère russe de la Défense a qualifié ces bombardements de "réponse" aux frappes ukrainiennes des dernières semaines sur le territoire russe, en particulier sur des raffineries. L'Ukraine a déclaré que ses attaques étaient elles-mêmes des représailles face à celles, quotidiennes, des Russes. "Les objectifs ont été atteints. Toutes les cibles ont été frappées", a affirmé le ministère russe.
>> LIRE EGALEMENT - Guerre en Ukraine : sans l'aide américaine bloquée au Congrès, «l'Ukraine perdra la guerre», avertit Zelensky
Au total, l'armée de l'air ukrainienne a assuré avoir abattu 39 drones et 18 missiles. Mais les dégâts sont là. Selon le ministre de l'Énergie, Guerman Galouchtchenko, "des installations de production et des systèmes de transmission" ont été visés dans les régions de Kiev, Kharkiv (nord-est), Zaporijjia (sud-est) et Lviv (ouest). Une grande centrale thermique près de la capitale a été "complètement détruite", a dit un représentant de l'entreprise gérante.
En outre, quatre personnes ont été tuées et cinq autres blessés à Mykolaïv, dans le sud, "en pleine journée" jeudi au cours d'une attaque aérienne russe, a fait savoir l'armée ukrainienne. "Des bâtiments résidentiels et des voitures privées ont été endommagés. Des dégâts dans des installations industrielles ont également été constatés", a-t-elle ajouté.
Besoin de munitions
Face à des soldats russes à l'offensive, Volodymyr Zelensky réclame à ses partenaires occidentaux plus de munitions et surtout des systèmes de défense antiaérienne, à commencer par des Patriot américains. "L'essentiel est maintenant de tout faire afin de renforcer notre défense antiaérienne, pour répondre aux besoins urgents (...) ainsi que pour consolider le soutien international afin de vaincre la terreur russe", a écrit le résident ukrainien sur les réseaux sociaux à l'occasion d'un déplacement en Lituanie.
Le chef de l'Etat ukrainien a en outre annoncé la signature d'un accord décennal avec la Lettonie qui inclut un soutien militaire annuel de ce pays à l'Ukraine "à hauteur de 0,25% du PIB". Le Kremlin a, de son côté, jugé jeudi que des pourparlers sur l'Ukraine sans la Russie n'avaient "aucun sens", après que la Suisse a déclaré la veille organiser une telle conférence pour la mi-juin sans représentation russe mais en présence d'une centaine d'autres pays.