"Rien n’a changé pour les Cubains". L’écrivain et journaliste Eduardo Manet est catégorique. Un an après l'annonce spectaculaire du rapprochement avec les Etats-Unis, l’île de Cuba a beau profiter de sa nouvelle image, avec un impact notable sur les affaires et le tourisme, pour la grande majorité des Cubains, la situation demeure inchangée.
"Le pays est envahi par le tourisme, il y a de plus en plus d’hôtels et de restaurants mais pour les Cubains, le niveau de vie est toujours aussi bas", regrette, l’écrivain et dramaturge, interrogé par Europe1.fr. En effet, depuis plusieurs mois les hôtels, restaurants et bars à la mode ne désemplissent pas, profitant d'un regain d'intérêt touristique pour l'île, avec une hausse d’environ 17,6% de touristes en plus prévue en 2015.
Un début de classe moyenne. Mais cet emballement reste sans effet pour une grande partie des Cubains, toujours en proie à un quotidien difficile. Les maigres salaires (20 dollars mensuels en moyenne) peinent à couvrir les besoins et le recours à la fameuse débrouille locale reste la norme. "Les Cubains continuent à cumuler deux, trois emplois pour pouvoir vivre. Les habitants louent des chambres aux touristes", a pu observer Eduardo Manet, qui vit aujourd’hui à Paris, mais qui s’est rendu à Cuba début décembre.
Mais une classe moyenne semble émerger doucement sur l’île. "Cela se voit avec le retour de vieilles traditions cubaines comme la fête qu’on donne pour les 15 ans d’un ou d’une cubaine et qui avaient disparues jusqu’à présent. Même chose pour les mariages, on voit des choses somptueuses", explique Eduardo Manet, précisant que "ce n’est encore qu’une certaine frange de la population qui bénéficie de ces changements. Ceux qui ont les moyens, par exemple, d’avoir un restaurant".
Peu de liberté d’expression. Du point vue de politique, la situation est toujours la même, selon l'écrivain. "La liberté d’expression est toujours aussi surveillée qu’auparavant. Les difficultés sont toujours les mêmes pour les blogueurs, les militants politiques de l’opposition", détaille-t-il.
En effet, aux exhortations du président Barack Obama, qui réclame des inflexions en la matière, La Havane oppose "souveraineté nationale" et "non-ingérence". Mardi, le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme Zeid Ra'ad al Hussein faisait part de sa préoccupation face aux "centaines d'arrestations arbitraires" enregistrées notamment à l'occasion de la dernière Journée internationale des droits de l'homme.
Vers un changement politique ? A Cuba, le principal changement cette année pourrait être d'ordre politique, avec comme échéance le 7e congrès du Parti communiste cubain (PCC, unique), prévu en avril. Très attendu, cet événement doit entériner le départ de la vieille garde du parti et définir la loi devant régir les élections générales de 2018. "Il existe aujourd’hui un très grand espoir du peuple cubain de voir, enfin, une ouverture du pays", conclut Eduardo Manet. Reste à voir si les promesses seront tenues : Raul Castro a annoncé qu'il quitterait le pouvoir après les élections de 2018.